L’équipier : Film sur la pente descendante

Il est monnaie courante que le sport et le cinéma s’allient sur le grand écran, donnant parfois vie à des films légendaires et magnifiques. On pense notamment à Raging Bull de Scorsese, The Wrestler d’Aronofsky, Rocky de John G. Avlidsen, ou plus récemment Et puis nous danserons de Levan Akin. Mais parmi les sports comme la danse ou ceux de combat, massivement représentés dans le paysage cinématographique mondial, il y en a un qui passe un peu sous les radars : le cyclisme. Pourtant massivement suivi, le cyclisme reste un terrain largement inexploité par le cinéma. C’est ce à quoi Kieron J. Walsh tente de remédier avec L’équipier, sa deuxième réalisation en 20 ans de carrière. Le réalisateur choisit donc de suivre Dom, cycliste de 39 ans qui s’accroche à sa carrière face à la menace que représente la jeunesse de ses coéquipiers, en plein Tour de France 98, une édition marquée par des scandales de dopage multiples.

Difficile d’aborder et de critiquer un film comme L’équipier. D’ordinaire, on commencerait par écumer les quelques qualités du film, avant de parler de ses défauts, mais même en fouillant bien, il est compliqué d’en trouver une. En fait, avec ce film, on est confronté à un cas d’école classique du film moyen, oubliable et inconséquent. Les acteurs ? Ils ne sont pas horribles, mais loin d’être bon non plus. Le scénario ? Pas désagréable (et encore), mais prévisible à souhait et jamais intéressant. Les aspects plus techniques ? Une mise en scène pubarde, une musique inexistante et une photographie dont on n’a pas grand-chose à dire.

Ce qu’il y a de plus terrible, c’est que L’équipier ne semble même pas avoir l’ambition d’être un bon film, qui se démarque des autres.

Mais alors, qu’est-ce qui fait tenir le film tout du long ? En fait, ce qui donne tout son intérêt au film, c’est sa promesse. Le carton d’introduction nous vendant un scandale historique, une édition du Tour de France marquée par son record de joueurs drogués et dopés, nous sommes dès le début en droit d’attendre une histoire haletante, scandaleuse, relatant un moment important du cyclisme, voire même de l’Histoire du sport en général. Pour ce qui est du film en lui-même, il n’en est rien. Se concentrant sur les déboires sportifs de Dom, le réalisateur semble oublier son sujet. Dopé, comme beaucoup d’autres dans son équipe, Dom prend le risque de malmener son corps, de repousser ses limites, pour s’assurer de toujours performer. Peut-être est-ce le récit d’une petite histoire dans la grande me direz vous ? Même là, le film se manque. On ne ressent jamais l’extérieur, le contexte environnant, ou la compétition en elle-même. Seul compte Dom, ses ennuis, et son équipe, et jamais la focale ne s’agrandit pour capter le reste de l’évènement.

En ressort un film décousu, qui ne nous fait croire à aucun moment à l’effort de ses personnages ou à la douleur qu’ils éprouvent. Son seul exploit est de réussir à nous faire entre apercevoir le potentiel dramatique et cinématographique du cyclisme, tout en échouant à l’exploiter pleinement.

Jusque dans sa dernière scène, où le personnage principal est confronté à un choix fatidique, à savoir continuer ou arrêter, le film effectue une acrobatie étonnante, un véritable aveu de faiblesse, et d’absence de propos sur son sujet. C’est la question que l’on se pose durant tout le visionnage du film : qu’essaie-t-on de nous dire ? À part que la drogue est mauvaise pour la santé (merci du scoop), c’est bien le manque de réflexion qui frappe.

Ce qu’il y a de plus terrible, c’est que L’équipier ne semble même pas avoir l’ambition d’être un bon film, qui se démarque des autres. Tout au plus, L’équipier tente d’être un bon élève, c’est-à-dire attendu, sympathique et classique. Là encore, il échoue à s’offrir le classicisme qui pourrait le rendre supportable ou regardable. On finit par regarder le film sans le regarder vraiment, avec distance et dédain. On s’en serait bien passé.

1.5

RÉALISATEUR :  Kieron J. Walsh
NATIONALITÉ : Irlande, Luxembourg, Belge
AVEC : Louis Talpe, Matteo Simoni, Tara Lee
GENRE : Drame
DURÉE : 1h35
DISTRIBUTEUR : Epicentre Films
SORTIE LE 29 juin 2022