Clara Sola : la vacuité pour s’affranchir

A travers son premier long-métrage, Clara Sola, la Suisse d’origine costaricienne Nathalie Alvarez Mesen réinvente le réalisme magique particulièrement présent dans le cinéma latino-américain à travers l’émancipation de la protagoniste.

Dans un village perdu au fin fond du Costa Rica, Clara, souffrant d’un handicap physique, vit sous la surveillance constante de sa mère qui voit en elle la vierge. A l’âge de 40 ans, elle commence une démarche de libération des carcans religieux et sociaux pesant sur ses épaules depuis toujours. Par cette libération, cette femme découvre par elle-même la sexualité et la spiritualité.

Nathalie Alvarez Mesen réinvente le réalisme magique particulièrement présent dans le cinéma latino-américain à travers l’émancipation de la protagoniste.

Clara Sola est un film d’émancipation. Clara décide, alors qu’elle vit depuis toujours sous le poids de la domination et de l’oppression, de s’extraire de ce schéma en arrêtant d’endosser les rôles que les femmes sont censées jouer. Ce film montre ce qui suit la prise d’une telle décision : non pas l’extinction d’une femme, mais son éveil. Clara rayonne, signe que cette émancipation ouvre la porte de la vie, la vraie, celle de la liberté. Ce phénomène est splendidement retranscrit à travers la mise en scène : réel et imaginaire se recoupent inlassablement, et les éléments extraordinaires ne donnent qu’un bref aperçu de la richesse intérieure de Clara. Ainsi, la magie imprègne le réel jusqu’à aboutir à la personnification du monde intérieur de Clara. Celle-ci n’est pas réduite à être une femme et devoir endosser les obligations qui sont socialement celles de tout individu du sexe féminin ; elle est bien plus que cela. Comment mieux rendre compte de sa liberté d’esprit et de sa pensée foisonnante qu’à travers des scènes de pure magie ?

Clara Sola est une réussite par le choix de la retenue. Cette ode à l’émancipation des femmes évite ainsi de tomber dans le cliché. Loin des revendications violentes qui ont tendance à dominer dans les œuvres rapportant une lutte contre une situation d’oppression, Nathalie Alvarez Mesen a fait le choix du minimalisme. Le peu d’informations transmises instaure un climat particulier qui ne fait que renforcer l’attention et la curiosité du spectateur quant au personnage de Clara qui, dans son monde, parle aux animaux et sent la terre trembler. Ainsi si le film ne présente en apparence que peu d’action, l’approche sensorielle n’en est que bien plus forte . Le message et les émotions passe par l’atmosphère et non par des paroles et actes explicites, n’est-ce pas la preuve d’un film réussi ?

Ainsi, Clara Sola est un film a priori pauvre en objets mais riche de sujets. Un fil dramatique simple et dénudé d’artifices, un hommage à l’émancipation. Nathalie Alvarez Mesen semble avoir trouvé dans le vide et l’aride, un moyen de manifester et de s’exprimer.  

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RÉALISATEUR :  Nathalie Alvarez Mesen
NATIONALITÉ : suisse, costaricaine
AVEC : Wendy Chinchilla Araya, Daniel Castañeda Rincón, Ana Julia Porras Espinoza
GENRE : Drame 
DURÉE : 1h46
DISTRIBUTEUR : Epicentre Films 
SORTIE LE 1er juin 2022