Sur la Route de Compostelle : à la croisée des destins

Disponible en DVD chez L'atelier d'images. Bonus DVD : Le Camino vu du ciel. 

Accrochée au bout d’un fil, la coquille Saint-Jacques se balance au gré des pas : elle ne pèse rien sur le sac, néanmoins sa présence est lourde de sens. Symbole des pèlerins et des chemins menant à la capitale de la Galice au nord-ouest de l’Espagne, la coquille rappelle la quête de son porteur : marcher jusqu’à Saint-Jacques de Compostelle, finalité d’une aventure aussi physique qu’intérieure. Et comme nous le montre très justement le touchant documentaire du duo Noel Smyth et Fergus Grady, le chemin vaut autant que le but. Derrière les kilomètres parcourus, des rencontres, des récits, des espoirs, et surtout, une formidable fraternité.

De la frontière française à la Galice, Sur la Route de Compostelle nous immerge dans l’intimité de six destins. Des tranches de vies qui gravitent autour des thèmes du deuil et de la résilience, avec un horizon commun : le dépassement de soi. On découvre ainsi Sue, une vielle dame en proie à des soucis de santé, véritable figure de ce documentaire. Malgré son sourire, chaque journée est un challenge supplémentaire pour cette femme de 70 ans. Si parfois la douleur physique l’emporte, sa volonté de réussir est impérieuse : une manière d’affronter une dernière fois la fatalité d’un corps vieillissant. C’est également le récit de Julie, une veuve ayant perdu son époux et son fils à quelques jours d’intervalle. Un drame comme une marque indélébile, une souffrance intérieure qu’elle tente d’exorciser. Elle peut heureusement compter sur ses compagnons pèlerins pour l’épauler dans cette épreuve initiatique. Bien qu’ils ne se connaissent pas, ils partagent cette expérience fédératrice qui délie les langues et les esprits.

Complémentaire à cet esprit de solidarité, les longues marches journalières sont propices à l’introspection. Bien que principalement porté sur les pèlerins, le documentaire capte avec intelligence les marques de notre passage sur ce chemin emprunté par plus de 250 000 personnes chaque année. Les champs, les vallées vertes, les petites communes et les grandes villes, les paysages sont nombreux et rendent compte de la diversité des lieux rencontrés lors du pèlerinage. Les plans aériens, jouant des courbes des chemins, sont particulièrement appréciables. Le documentaire s’attarde notamment sur une parcelle réputée pour son aridité, la Meseta, une terre quasi désertique. Une géographie finalement symbolique qui, quelque part, rappelle les aspérités de la vie.

Profondément humain, Sur la Route de Compostelle du duo australo-néo-zélandais Noel Smyth et Fergus Grady, émeut et passionne. Un documentaire sensible sur une route où se croisent des destins différents, et pourtant si dramatiquement semblables. Si chacun porte sa propre croix, une véritable fraternité lie les pèlerins sur ce chemin aussi mystique qu’historique, direction Saint-Jacques de Compostelle.