Bodies : corps-à-corps avec le temps

Avec son enquête policière complexe traversant différentes époques, Bodies a rapidement conquis les abonnés de la plateforme Netflix, devançant des mastodontes comme Lupin ou Elite. La mini-série britannique, créée par Paul Tomalin et adaptée du roman graphique de Si Spencer (DC Comics, 2014), se déroule dans le quartier de Whitechapel à Londres, tristement célèbre pour avoir été le théâtre des meurtres du tueur en série Jack l’Éventreur en 1888. 

La série s’ouvre sur la découverte du corps d’un homme dans une ruelle, à quatre époques différentes : 1890, 1941, 2023 et 2053. Le cadavre présente les mêmes caractéristiques troublantes : un impact de balle à l’œil gauche et un mystérieux tatouage au poignet. Les investigations sont menées en parallèle par quatre détectives. Le premier à se pencher sur l’affaire est Alfred Hillinghead (Kyle Soller) en 1890, un inspecteur droit et intègre qui doit cacher son homosexualité. En 1941, l’enquête est dirigée par Charles Whiteman (Jacob Fortune-Lloyd), un flic corrompu qui trempe dans des affaires louches. En 2023, Shahara Hasan (Amaka Okafor), policière et mère célibataire, se lance à corps perdu dans cette enquête au détriment de sa vie personnelle. Enfin, en 2053, c’est Iris Maplewood (Shira Haas), gardienne loyale d’une nouvelle société, qui cherche à élucider le mystère entourant ce meurtre.

Bodies explore les liens entre passé, présent et futur et met en perspective des thématiques existentielles telles que la nature humaine, le destin ou bien encore le libre arbitre.

Bodies se distingue par sa capacité à jongler entre différentes époques, offrant aux spectateurs, en plus de son intrigue policière, des reconstitutions historiques réalistes à la manière d’un Cloud Atlas (Lana et Lilly Wachowski, 2012). La mini-série nous plonge dans quatre environnements singuliers dont les codes reflètent l’époque à laquelle ils appartiennent. Chacun des détectives est un paria de son époque, en raison de son orientation sexuelle, de son origine ethnique, de son sexe ou de son handicap. Une manière d’aborder au cours de ces voyages temporels des thèmes tels que la discrimination, la marginalisation ou l’oppression. Dans chaque temporalité, l’enquêteur est confronté à des défis personnels et professionnels liés à son identité et à son époque.

En raison de sa complexité et de ses voyages temporels, Bodies est souvent comparé à Dark, une autre production Netflix. Les va-et-vient entre les différentes époques sont ici très bien amenés et parfaitement lisibles, ce qui rend la série plus facile d’accès que son prédécesseur allemand. Bodies explore les liens entre passé, présent et futur et met en perspective des thématiques existentielles telles que la nature humaine, le destin ou bien encore le libre arbitre. Au-delà de l’aspect divertissant de cette enquête policière aux accents fantastiques, la série nous propose de vrais moments d’émotion. Malgré quelques incohérences relevant de paradoxes temporels et des séquences un brin prévisibles, la série parvient à maintenir notre intérêt tout au long de ses huit épisodes. 

Le succès de Bodies tient à son habileté à combiner une intrigue policière haletante, des personnages complexes et une réflexion philosophique captivante. Cependant, à trop vouloir cumuler les rebondissements, la série finit par perdre en cohérence et en pertinence. Plutôt que d’achever son récit sur la résolution de sa boucle temporelle, le créateur Paul Tomalin fait le choix douteux d’ajouter dans les toutes dernières secondes de la série un twist incompréhensible et parfaitement superflu, dommage…

3.5

CRÉATEUR : Paul Tomalin
NATIONALITÉ : Britannique
GENRE : Policier, Science-fiction
AVEC : Kyle Soller, Jacob Fortune-Lloyd, Amaka Okafor, Shira Haas, Tom Mothersdale, Gabriel Howell et Stephen Graham
DURÉE : 8x 55-61mn
DIFFUSEUR : Netflix
SORTIE LE 19 octobre 2023