En avril 2023, Les Trois Mousquetaires : D’Artagnan a rempli une mission fort difficile, satisfaire aux critères d’un blockbuster hexagonal tout en demeurant une oeuvre digne et de qualité. Suivez notre regard vers Astérix. Dimitri Rassam, producteur du film, a ainsi réussi son pari. Car Les Trois Mousquetaires : D’Artagnan, sans vouloir faire offense à son metteur en scène, est avant tout un projet de producteur. Dimitri Rassam a avoué d’ailleurs vouloir rechercher ce qui pouvait ressembler à une mythologie dans l’Histoire de France. Le pari était encore plus ambitieux puisqu’à la manière de Dune de Denis Villeneuve, il s’agissait de conter cette histoire en deux films et par conséquent de donner rendez-vous aux spectateurs plus de six mois plus tard pour la suite. Nous y voici avec la sortie de Les Trois Mousquetaires : Milady. Avec ce nouvel opus, Dimitri Rassam et Martin Bourboulon vont-ils renouer avec la réussite du film de cape et d’épée?
Constance Bonacieux a disparu : elle s’est fait kidnapper par les sbires de Richelieu. En partant à sa recherche, D’Artagnan, son amoureux éperdu, tombe dans les rets et sous le charme vénéneux de Milady de Winter. De sombres secrets pèsent sur cette femme fatale, des secrets qui ont également déterminé la vie d’un des mousquetaires, collègues de D’Artagnan.
Dans ce nouvel opus, les atouts restent quasiment les mêmes (hormis un aspect comique bienvenu), en particulier un filmage systématique des scènes d’action en impressionnants plans-séquences,
Pour réussir cette remise au goût du jour du film de cape et d’épée, Dimitri Rassam a misé sur plusieurs éléments : 1) un casting parfait. Dans le cinéma français d’aujourd’hui, il a sans doute opté pour les meilleurs acteurs possibles dans les rôles des mousquetaires. En effet, on imagine mal d’autres comédiens que François Civil pour incarner l’intrépidité de D’Artagnan, Vincent Cassel pour la dignité bafouée d’Athos, Romain Duris pour l’amour-propre à fleur de peau d’Aramis, ou Pio Marmai pour la jovialité bon enfant de Porthos. Idem concernant Eva Green pour la beauté fascinante de Milady ou encore Louis Garrel qui compose de façon jubilatoire un Louis XIII subtilement décalé. 2) Une mise en scène ample et spectaculaire, n’ayant pas grand’chose à envier à un Ridley Scott des grands jours (Gladiator, Kingdom of Heaven) où toutes les scènes d’action sont filmées en plans-séquences, misant à fond comme Cruise dans la saga Mission : Impossible sur l’effet de réalisme. 3) Enfin une modernisation discrète mais guère négligeable où les rôles féminins (Milady, Constance, Anne d’Autriche) prennent toute leur importance et quelques touches de diversité font leur apparition (un mousquetaire noir, une Constance Bonacieux beur, un Porthos bisexuel), faisant retentir un léger écho du monde d’aujourd’hui.
Si dans ce nouvel opus, les atouts restent quasiment les mêmes (hormis un aspect comique bienvenu, plus développé du côté de Aramis, Porthos et Mathilde de Aramitz), en particulier un filmage systématique des scènes d’action en impressionnants plans-séquences, quelques légers bémols peuvent atténuer la réussite de l’ensemble : la troublante Eva Green, née sans doute pour interpréter Milady, ne possède pas assez de latitude pour étoffer la dimension tragique de son personnage, comme si Bourboulon avait craint de perdre la dimension grand public de son film, en explorant les méandres de noirceur du personnage de Milady ; pourtant Eva Green, fascinante et vénéneuse, s’avère plus que convaincante dans les scènes de confrontation psychologique, tout comme dans les combats ; enfin, le film se termine de manière osée sur un cliffhanger insoutenable. Serait-ce un appel du pied pour que les spectateurs se croient obligés de réclamer un troisième volet qui s’écarterait assez du roman d’Alexandre Dumas?
Ces réserves mineures ne suffisent pas à ternir le beau divertissement qui nous est offert. On peut simplement regretter que Bourboulon qui avait largement matière à hausser son film au niveau tragique, s’en soit presque détourné, en privilégiant l’enchaînement de séquences échevelées.
RÉALISATEUR : Martin Bourboulon NATIONALITÉ : française GENRE : aventure, cape et d'épée, historique AVEC : François Civil, Eva Green, Vincent Cassel, Romain Duris, Pio Marmai, Lyna Khoudri, Vicky Krieps, Louis Garrel DURÉE : 1h55 DISTRIBUTEUR : Pathé SORTIE LE 13 décembre 2023