La Passagère : la pêcheuse-pécheresse

La pêcheuse-pécheresse. Ça arrive rarement, mais ça arrive, la bande-annonce du film qui passe juste avant le film. Est-ce parce que c’était une avant-première ? Moi je m’en fous, j’avais lu le synopsis, et ça ne me dérange jamais trop d’être spoilé, mais c’est un sale coup pour ceux qui n’en voulaient rien savoir avant de le voir. Par-dessus le marché, la bande-annonce n’est pas terrible, je dirais même plus, elle fait craindre le pire. Mais le film est beaucoup mieux que ça. C’est un premier film tout ce qu’il y a de compétent et bien fabriqué, un film un peu magazine féminin, si on veut être méchant — du reste je n’ai rien contre les magazines féminins, mais vous saisissez l’idée —, qui raconte un adultère à Noirmoutier. En gros il a deux atouts. D’une, une fin à ellipse qui, même prévisible, est bien menée. On se dit, une fin pareille dans La Peau douce, ça aurait eu de la gueule. C’est qu’on se pose la question de l’inscription de la fin dans l’époque, le Zeitgeist comme on dit (et on se demande comment ça aurait fonctionné si La Passagère avait été un Passager — si ça avait été un homme mûr avec sa jeune apprentie). Mais glissons là-dessus.

Si vous trouvez Cécile de France belle — qui ne la trouve pas sublime —, et souhaitez jouir du spectacle de sa beauté, allez le voir.

Je dis que la fin est bien menée, c’est que c’est dans les détails, dans l’incarnation, que le film est réussi. Prenez la description du travail des pêcheurs (même si ce n’est pas aussi bien que ce qu’on voit dans Illumination de Pascale Breton — j’en profite pour redire à quel point ce dernier fut un des plus beaux films que j’ai vus cette année). Prenez la description des ébats des pécheurs, jolis et sensuels sans tomber dans l’excès. À l’inverse, il y a un détail qui m’interroge — que ce soient des enfants qui expriment la désapprobation de la communauté. C’est à la fois bien, parce qu’il y a peut-être besoin d’un peu de violence à ce moment du récit, et pas bien, parce que c’est dommage de faire porter le chapeau du patriarcat à des gosses (et à une voisine relou façon commère dans Fury — rétrospective Fritz Lang à la Cinémathèque en janvier, ai-je cru comprendre). J’ai aussi des réserves concernant la séquence un peu ’’réalisme magique’’ qui correspond à la photo en illustration. Mais ce n’est pas ce qui compte. Ce qui compte, c’est Cécile de France, c’est elle le détail incarnant crucial, le gros énorme formidable deuxième atout du film. Si vous trouvez Cécile de France belle — qui ne la trouve pas sublime —, et souhaitez jouir du spectacle de sa beauté, allez le voir.

3

RÉALISATEUR :  Héloïse Pelloquet 
NATIONALITÉ : française 
GENRE :  Drame, romance 
AVEC :  Cécile de France, Félix Lefebvre, Grégoire Monsaingeon
DURÉE : 1h35 
DISTRIBUTEUR : Bac Films 
SORTIE LE 28 décembre 2022