L’Histoire de ma femme : mariés au premier regard

Cinq ans après le très remarqué Corps et Âme, la réalisatrice hongroise Ildiko Enyedi accoste le tapis rouge cette année avec L’Histoire de ma femme, portrait du mariage mouvementé d’un capitaine de navire et d’une jeune Française. Avec à son bord deux des acteurs français les plus célébrés de leur génération, Léa Seydoux et Louis Garrel, la réalisatrice hongroise propose malheureusement un film qui fait naufrage, perdu par ses longueurs et la lourdeur de son style littéraire.

Revenant à terre après un long voyage en mer, le capitaine Jacob Störr fait un pari audacieux, accoudé à la table d’un café avec un ami proche : il demandera en mariage la première femme à passer le pas de la porte. Entre alors Lizzie, jeune blonde française insaissisable douée de charme et d’humour. Réunis par le hasard, les deux compagnons de galère embarquent à bord d’un mariage houleux, raconté en sept parties.

« Ayant pour ambition de s’inscrire dans le prolongement de grands peintres des relations humaines comme DostoïevskI, L’Histoire de ma femme échoue assez singulièrement, aboutissant sur un film bien trop long et passionnellement inintéressant. Une contre-performance dramatique pour l’autrice de Corps et Âme, qui propose une fresque qui ne devrait pas convaincre grand monde malgré son casting d’exception. »

Impossible de ne pas trouver L’Histoire de ma femme intensément trop long. D’une durée totale de près de trois heures, chacune des sept parties du film est interminable, en plus d’avoir une correspondance douteuse avec le titre de chacune d’entre elles. S’inscrivant certainement dans le prolongement d’auteurs classiques comme un Dostoïevski, Ildiko Enyedi tente de livrer un portrait approfondi de deux personnages complexes, sans arriver pourtant à convaincre le spectateur de l’intérêt de cette démarche et de la réussite de son entreprise. Si Léa Seydoux donne chair au personnage de Lizzie avec une certaine réussite, incarnant l’ambivalence de son attitude tantôt affectueuse, tantôt distante, jamais les personnages n’arrivent à atteindre la profondeur charnelle d’un grand auteur de la littérature moderne. S’égarant dans sa démarche comme un navire se perd en mer, L’Histoire de ma femme devient alors le spectacle épouvantablement long d’une tentative esthétique infructueuse d’autant plus frustrante qu’elle n’en finit jamais de finir.

Un résultat décevant pour un film qui jouissait pourtant d’éléments de mise en scène tout à fait attrayants. L’histoire de ma femme est en effet riche de moments saisissants, comme ces scènes à la surface d’une mer déchaînée ou encore ces plans en apesanteur donnant à voir deux baleines majestueuses. Les décors sont tout aussi satisfaisants dans ce film à costumes qui reconstitue les lieux de sociabilité petite-bourgeoise d’une société européenne cosmopolite et libérée. Cependant, ces quelques plaisirs visuels sont bien vite engloutis par une marée de dialogues peu intéressants et par une histoire qui n’avance pas. Loin de ses autres longs-métrages, Ildiko Enyedi livre donc un film décevant et peu mémorable, malgré tous les efforts de ses interprètes, de sa mise en scène et de sa photographie.

Ayant pour ambition de s’inscrire dans le prolongement de grands peintres des relations humaines comme Dostoïevski, L’Histoire de ma femme échoue assez singulièrement, aboutissant sur un film bien trop long et passionnellement inintéressant. Une contre-performance dramatique pour l’autrice de Corps et Âme, qui propose une fresque qui ne devrait pas convaincre grand monde malgré son casting d’exception.

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RÉALISATEUR : Ildiko Enyedi
NATIONALITÉ : Hongroise, Allemande, Italienne, Française
AVEC : Gijs Naber, Léa Seydoux, Louis Garrel
GENRE : Drame, Historique, Romance 
DURÉE : 2h49
DISTRIBUTEUR : Pyramide Distribution
SORTIE LE 16 mars 2022