Jacky Caillou : Chien méchant dans les Hautes-Alpes

Présenté à Cannes dans la sélection de l’ACID, Jacky Caillou est le premier film de Lucas Delangle. En pleine montagne, Jacky vit avec sa grand-mère, une magnétiseuse qui guérit les maux de ceux qui viennent la consulter. Quand une jeune fille arrive en ville marquée d’une étrange tache au dos, Jacky va pouvoir mettre à profit les dons que lui a transmis sa grand-mère.

Ce qui saute aux yeux en premier lieu, c’est qu’avec Jacky Caillou, le réalisateur ajoute sa petite pierre à un édifice relativement jeune, celui d’un cinéma français qui se réapproprie les paysages ruraux pour les inscrire dans une dynamique horrifique. En effet, après Teddy des frères Boukherma, La Nuée de Just Philippot ou encore Ogre d’Arnaud Malherbe plus récemment, la France rurale semble continuer d’inspirer les auteurs de genre. C’est l’un des points forts du film : son environnement, niché dans les Alpes, entre forêts envahissantes et relief montagneux baignés dans les nuages. Par moments, on sentirait presque une influence venue d’Alain Guiraudie, l’expérience en moins.

Le réalisateur ajoute sa petite pierre à un édifice relativement jeune, celui d’un cinéma français qui se réapproprie les paysages ruraux pour les inscrire dans une dynamique horrifique.

Malheureusement, le goût que laisse le film en bouche est un peu amer. Car on se sent un peu trahi par le cinéaste, qui opère un changement de ton assez radical au bout d’une trentaine de minutes. Si le début laisse apparaître des touches d’humour et des personnages attachants, le reste adopte une teinte bien plus dramatique, qui déroute plus qu’elle ne convainc. À mi-chemin entre l’horreur, le fantastique et le pur drame, le film ne se trouve jamais vraiment. Le discours de Delangle est flou : qu’essaie-t-il vraiment de nous dire ?

Est-ce une histoire d’amour ? Si tel est le cas, celle-ci n’est pas assez incarnée. Est-ce une histoire de deuil ? Peut-être, mais alors elle reste très inexploitée. Est-ce une tentative purement fantastique ? Là encore, le film manque de générosité.

Pour autant, il serait dommage d’enterrer totalement le film. Thomas Parigi, acteur principal non professionnel, parvient à rester convaincant de bout en bout du récit, livrant une performance pleine de naïveté et de candeur. De même, Lou Lampros, jeune actrice que l’on voit de plus en plus, impressionne (toutes proportions gardées) dans un rôle assez inhabituel. Sans être désagréable, le manque de cohérence thématique, de clarté scénaristique et de radicalité de genre fait du film un objet de cinéma inachevé.

Jacky Caillou de Lucas Delangle nous laisse à la fois intrigué et frustré. On pourrait aisément remettre la faute sur son statut de « premier film », tant les défauts semblent être ceux d’un cinéaste cherchant encore sa personnalité artistique. Qui sait, peut-être sont-ce les débuts d’un réalisateur prometteur ?

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RÉALISATEUR :  Lucas Delangle
NATIONALITÉ : France
AVEC : Thomas Parigi, Lou Lampros
GENRE : Drame, thriller, fantastique
DURÉE : 1h32
DISTRIBUTEUR : Arizona Distribution
SORTIE : 2 novembre 2022