Amélie et la Métaphysique des tubes : au fil des souvenirs

Généralement, avant l’âge de deux à trois ans, ce sont les autres qui se souviennent pour nous : la mémoire n’étant pas encore tout à fait formée, les souvenirs de nos premiers instants s’échappent. Des années charnières et essentielles, à la découverte de tout : un monde qui nous traverse, comme dans un tube sans fin. Et à cet âge, l’identité n’est encore qu’un vague concept; nous ne sommes que stimuli et émotions. Au début des années 2000, l’autrice belge Amélie Nothomb s’essayait justement à un exercice autobiographique original avec Métaphysique des tubes : raconter ses premières années. Deux décennies plus tard, la toute jeune Amélie prend vie dans le premier film du duo Mailys Vallade et Liane-Cho Han, Amélie et la Métaphysique des tubes : une oeuvre magnifique, lumineuse et profonde, qui nous fait redécouvrir la vie à hauteur d’enfant.

La petite fille dévore le monde de son regard : elle est une spectatrice muette, un tube digestif qui assimile, un Dieu impassible qui se contente d’être. Les parents, qui vivent temporairement au Japon, ne s’en font pas, « la plante » pousse à son rythme et finira bien par fleurir. A la fin des années 60, un tremblement de terre secoue la maison d’Amélie : elle sort avec fracas de sa coquille. Les cris remplacent le silence, la petite ne tient pas en place. Jusqu’au jour où, à la faveur d’une simple tablette de chocolat blanc, Amélie naît enfin. Et déjà, elle doit dire adieu à son royaume : la famille doit rentrer en Belgique.

Amélie et la Métaphysique des tubes est un récit initiatique singulier aussi touchant que poétique, sublimé par une grande beauté visuelle.

Périlleuse expérience que d’adapter la Métaphysiques des tubes et d’en faire un film d’animation à destination des petits et grands, d’autant plus dans le cadre d’un premier long métrage. C’était toutefois sans compter le talent du duo Mailys Vallade et Liane-Cho Han, qui ont su transposer avec sensibilité et intelligence l’ouvrage d’Amélie Nothomb. Le temps d’un film, on retombe dans un âge lointain : celui de la petite enfance. Dotée d’une certaine maturité, la petite voit (à son échelle) et tente de comprendre le monde qui l’entoure. Le dessin coloré et lumineux embrasse le regard curieux de la fillette, tout en suggérant l’aspect temporaire de cet état de grâce. Bientôt, il faudra faire face aux premières désillusions et accepter de laisser certaines choses derrière soi : ni Dieu, ni plante, ni éternelle, Amélie doit se résoudre à trouver sa place parmi les autres. Pour avancer, on doit parfois se délester de nos croyances et regrets. Le film explore notre relation au passé et ses répercussions, notamment à travers les personnages de Nishio-san et Kashima-san. En définitive, Amélie et la Métaphysique des tubes est un récit initiatique singulier aussi touchant que poétique, sublimé par une grande beauté visuelle. À l’image de sa jeune héroïne, on ressort grandi de ce joli voyage… métaphysique.

4

RÉALISATEUR : Mailys Vallade, Liane-Cho Han
NATIONALITÉ : France
GENRE : Animation
AVEC : Loïse Charpentier, Victoria Grosbois, Isaac Schoumsky
DURÉE : 1h17
DISTRIBUTEUR : Haut et Court
SORTIE LE 25 juin 2025