The Quiet Girl : il n’y a pas de secret dans ce film

Nommé pour le meilleur film international aux Oscars 2023, The Quiet Girl a de cette manière un peu attiré l’attention sur lui. Car film discret, il n’avait guère remué les foules auparavant. Disons-le tout de go, The Quiet girl fait partie de ces jolis films lisses, sans aspérités, où l’on attend désespérément un éclat de vie qui ne nous fait pas l’honneur de surgir. Mieux photographié et cadré qu’Emily, encore plus atone qu’Aftersun, The Quiet Girl est aussi tranquille que sa protagoniste réservée, et ne fera guère de vagues dans les brumes de nos souvenirs.

Irlande, 1981, Cáit, une jeune fille effacée et négligée par sa famille, est envoyée vivre auprès de parents éloignés pendant l’été. Mais dans cette maison en apparence sans secret, où elle trouve l’épanouissement et l’affection, Cáit découvre une vérité douloureuse.

The Quiet girl fait partie de ces jolis films lisses, sans aspérités, où l’on attend désespérément un éclat de vie qui ne nous fait pas l’honneur de surgir.

En voyant The Quiet Girl, on s’attend au pire, d’un point de vue dramatique : pédophilie, inceste, torture psychologique. Le metteur en scène,  Colm Bairéad, dont c’est le premier film, fait d’ailleurs planer une menace diffuse qui ne concrétisera jamais. Plusieurs fois, de manière inquiétante, est répétée la phrase « Il n’y a pas de secret dans cette maison », pour qu’elle soit démentie. Or, après la révélation d’une voisine indiscrète concernant un secret de Polichinelle, force est de constater que de secret, il n’en existe véritablement aucun, hormis un deuil éminemment prévisible.

Par conséquent, il est donc légitime de s’étonner qu’un pareil film soit porté aux nues par une partie de la presse. Passons sur l’originalité de l’utilisation du gaélique irlandais qui est censé marquer une opposition dramaturgique entre certains personnages et qui paraît bien artificielle, montrant par contraste Les Banshees d’Inisherin comme un film accueillant. Le grand point fort du film réside dans son interprète principale, Catherine Clinch, une enfant de dix ans qui ne se départit jamais d’un sérieux et d’une gravité largement au-dessus d’une enfant de son âge. En-dehors de cela, The Quiet Girl se signale par une forme impeccable, des cadrages originaux et souvent penchés. Cela suffit-il pour en faire l’oeuvre exceptionnelle que certains vantent? Non, certainement pas. Le film répond à des critères minimaux de film d’auteur, bien lisse et sans failles, mais manque tristement d’élan vital, -sans même évoquer le manque de substance dramaturgique -, y compris de la part de la jeune actrice autour de qui il s’est construit.

Pour exposer le deuil et la solitude, objectifs pour le moins louables au cinéma, il faut néanmoins susciter un intérêt par la présence d’antagonistes. Sinon on se voit contraint de filmer beaucoup de plans de la jeune fille en train de participer aux travaux de la ferme, de courir en utilisant des ralentis superfétatoires, en faisant mine de laisser planer des menaces à l’horizon que rien ne viendra concrétiser. Tout cela au final pour un discours convenu et conventionnel sur une famille d’adoption aimante au détriment d’une famille biologique qui délaisse l’enfant et la met à l’écart. Certes, un discours qui peut paraître idéal pour faire pleurer Margot mais laisse assez insatisfait sur le plan cinématographique, à moins d’aimer les jolies images un peu creuses et de s’extasier devant les petits films languissants.

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RÉALISATEUR :   Colm Bairéad
NATIONALITÉ : irlandaise 
GENRE :  drame 
AVEC : Catherine Clinch, Carrie Crowley, Andrew Bennett
DURÉE : 1h36 
DISTRIBUTEUR : ASC distribution 
SORTIE LE 12 avril 2023