Quand vient l’automne : un Ozon retrouvé

Après l’immense succès de Mon crime, qui a rassemblé plus d’un million de spectateurs, François Ozon abandonne la sororité pour retourner à ses fondamentaux et évoquer l’important thème de la famille. Il revient ainsi à un style plus vénéneux, avec ce thriller bien mené qui lui permet de renouer avec les racines de son cinéma et de réaliser un film proche de l’univers littéraire de Georges Simenon.

Michelle, une grand-mère bien sous tous rapports, vit sa retraite paisible dans un petit village de Bourgogne, pas loin de sa meilleure amie Marie-Claude. A la Toussaint, sa fille Valérie vient lui rendre visite et déposer son fils Lucas pour la semaine de vacances. Mais rien ne se passe comme prévu.

François Ozon n’est jamais aussi performant que lorsqu’il aborde des sujets complexes comme les querelles familiales sur fond de haine ou de détestation.

Dans une maison rustique, au fin fond de la campagne, une grand-mère prépare des champignons sans savoir que cet aliment sera le début d’une discorde et le déclencheur de drames. Hélène Vincent, qui porte le film sur ses épaules, interprète une retraitée proche de son petit-fils mais dont les relations avec sa fille sont rompues depuis longtemps. François Ozon met en place une atmosphère vénéneuse, en dépeignant un climat austère où les rancœurs sont tenaces. Quand vient l’automne décrit une famille sclérosée, surtout par l’incommunicabilité prégnante entre une mère et sa progéniture, dont les fondements remontent loin dans le passé. Le cinéaste traite d’un sujet qui lui est cher, également partagé par Arnaud Desplechin : cette absence de dialogues qui empêche Michelle d’exprimer son amour pour sa fille Valérie, aux penchants suicidaires. Le film aborde les querelles, les non-dits et la nature délicate d’une relation désormais perdue. Toute l’essence du scénario, bien écrit, repose sur la complexité du personnage principal, au passé mystérieux, dont l’inconscient fantasme sur une proximité retrouvée avec celle qu’elle a mise au monde. Josiane Balasko joue Marie-Claude, une amie fidèle, elle aussi malmenée par son fils, ex-détenu (Pierre Lottin), qui tente de se réinsérer. Cela permet à François Ozon de continuer l’exploration des cocons familiaux brisés.

Hommage aux œuvres de Georges Simenon, Quand vient l’automne est un thriller où tous les personnages ont une part de mystère.

Le décor campagnard ne fait qu’illusion et devient le lieu de toutes les suspicions, ainsi que le terrain où se jouent les dissensions qui mènent à l’explosion inévitable. Les mensonges et les hontes du passé ressurgissent dans le présent, avec des personnages prêts à imploser nerveusement. Du repris de justice un peu ébranlé par ses démons violents à la fille paumée qui ne sait plus que faire de sa vie, Quand vient l’automne décrit une ambiance à la Simenon, saupoudrée d’une envie de meurtre et dominée par le spectre de la mort. François Ozon retrouve un cinéma focalisé sur le drame, un genre dans lequel il excelle particulièrement, grâce à sa capacité à faire vivre ses personnages et à sa maîtrise formelle du récit. Contrairement à Mon crime, dont le traitement était plus comique, ce long-métrage revient aux fondamentaux, avec toujours cette description de la figure féminine, dotée d’un soupçon de confusion et d’ambiguïté, mais qui possède une importance capitale dans la sphère familiale. Les qualités de mise en scène sont évidentes, comme toujours chez le réalisateur, qui se plaît à sublimer les lieux et à soigner ses plans. Quand vient l’automne est un Ozon retrouvé, brillant dans la narration, ambitieux, et certainement le plus abouti depuis Tout s’est bien passé. Hélène Vincent tient un rôle qui lui sied à merveille, difficilement refusable, et qui lui permettra probablement d’obtenir une nomination aux Césars 2025.

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RÉALISATEUR : François Ozon
NATIONALITÉ :  France
GENRE : Drame
AVEC : Hélène Vincent, Pierre Lottin, Ludivine Sagnier, Josiane Balasko
DURÉE : 1h42
DISTRIBUTEUR : Diaphana Distribution
SORTIE LE 2 octobre 2024