Al Pacino et Abigail Cowen dans The Ritual : l'exorcisme d'Emma Schmidt, de David Midell

The Ritual : l’exorcisme d’Emma Schmidt : l’ennuyeux péché de David Midell

À l’heure où les biopics tout comme les films d’horreur s’enchaînent au calendrier des sorties, bien heureux sera le/la cinéaste parvenant à trouver une formule nouvelle pour traiter ces genres populaires. Avec The Ritual : l’exorcisme d’Emma Schmidt, un long-métrage qui mélange les deux registres, David Midell se contente de faire du réchauffé sans même profiter pleinement du fait d’avoir Al Pacino sous la main. En résulte un film au rythme saccadé, qui malgré sa mise en scène immersive, se complaît dans une succession de séquences clichés répétitives et assommantes. 

En 1928, la jeune Emma Schmidt (Abigail Cowen) est admise dans un couvent reculé du Midwest américain. Très vite, les phénomènes inexpliqués se multiplient. Le prêtre Joseph Steiger (Dan Stevens) fait alors appel à un exorciste reconnu, Theophilus Riesinger (Al Pacino). Ce qu’ils vont découvrir dépasse l’imagination. Ce dossier, basé sur une histoire vraie, a été longtemps tenu secret par l’Église. C’est le cas de possession démoniaque le mieux documenté de l’histoire des États-Unis.

Adepte du minimum syndical en termes de jeu dans chaque scène où il apparaît, Al Pacino participe activement au sentiment d’ennui profond que l’on éprouve devant ce film maladroit de bout en bout.

De par son thème, le film souffre évidemment d’une comparaison avec L’Exorciste, de William Friedkin. Pour se démarquer de l’emprise de ce classique du cinéma d’horreur américain, David Midell a opté pour un style de prise de vue qui rappelle les documentaires, peut-être pour rappeler que le récit est basé sur des faits réels. Caméra à l’épaule pour plus d’immersion, travellings avant et arrière à répétition : tout est fait pour donner au spectateur le sentiment de regarder de véritables images d’un exorcisme en 1928. Cela aurait pu davantage fonctionner sans l’ajout de scènes plus intimistes (des conversations dans un bureau, des personnages seuls dans leur chambre), tournées de manière plus classique et qui viennent casser l’effet “mockumentary” insufflé en premier lieu. En résulte un mélange barbare entre plusieurs façons de filmer, ce qui amoindrit considérablement le rythme et l’impact des scènes horrifiques qui s’enchaînent au long du film, sans que les acteurs puissent rattraper le coup.

The Ritual : l’exorcisme d’Emma Schmidt se paie le luxe de compter Al Pacino parmi son casting, mais la légende du cinéma américain brille par son manque d’éclat devant la caméra. Adepte du minimum syndical en termes de jeu dans chaque scène où il apparaît (et il incarne pourtant l’un des personnages principaux), le comédien participe activement au sentiment d’ennui profond que l’on éprouve devant ce film maladroit de bout en bout. Le reste du casting, convaincant sans être impressionnant, ne développe toutefois aucune alchimie lors des scènes, rendant l’ensemble encore moins digeste. Les séquences d’horreur récurrentes, où le surnaturel survient de manière brutale mais attendue, laissent de marbre et ne sont aucunement embellies par les acteurs.

Le long-métrage est construit autour des multiples séances visant à exorciser Emma Schmidt, ce qui va constituer une gradation dans l’horreur, autant pour la pauvre jeune fille que pour le personnel religieux chargé de l’aider. Du scepticisme initial du Père Steiger, on bascule rapidement dans un bouleversement religieux puis une lutte entre le bien et le mal. Mais alors que la dimension profane, voire démoniaque, est mise maladroitement en avant tout au long du film, il est fait peu de place au sacré, qui est pourtant l’une des clés de voûte du récit. La dimension religieuse est vite éludée au bénéfice des traumas internes des personnages (la perte d’un frère, une remise en cause de la foi), qu’ils surmontent rapidement pour laisser la place à la seule thématique jugée importante : l’exorcisme d’Emma Schmidt. Comme d’autres cinéastes avant lui, David Midell ne semble pas avoir compris que le pouvoir de la suggestion et du sacré avait un bien meilleur impact sur un récit d’exorcisme que d’enchaîner des scènes horrifiques clichées et peu convaincantes sans prendre le temps de réellement développer ses personnages.

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RÉALISATEUR : David Midell
NATIONALITÉ : Américain
GENRE : Horreur/Biopic
AVEC : Al Pacino, Dan Stevens, Ashley Greene Khoury
DURÉE : 1h38
DISTRIBUTEUR : KMBO
SORTIE LE 20 août 2025