Les Cyclades : vacances, j’oublie tout

Marc Fitoussi (La Vie d’artiste, Copacabana, Les Apparences) propose une virée énergisante dans les superbes paysages des Cyclades grecques, avec ce film sentant bon la mer bleue et les vacances méditatives et relaxantes. Ces lieux paradisiaques servent de décor pour raconter des retrouvailles nostalgiques, entre deux amies s’étant perdues de vue pendant plusieurs années. Quoi de mieux que ce cadre idyllique pour rétablir une amitié jadis fusionnelle ? Telle est la question que pose ce film qui, sous ses airs de comédie, se change en allégorie du temps qui passe et du souvenir d’une adolescence rêveuse et enthousiaste. Le cinéaste français réalise une comédie gentille, certes abondante de clichés, mais questionnant sur l’amertume du présent, la joie du passé et la crainte du futur. Un rythme souvent bancal, et un duo déséquilibré, représentent les points négatifs d’un film ayant pourtant de la matière pour séduire.

Blandine et Magali se sont connues au collège, mais ont vu leur amitié se briser soudainement. Après plus de vingt ans sans se parler, un voyage en Grèce va leur permettre de reprendre des échanges amicaux.

Film estival par excellence, avec des plans larges sur le paradis grec, Les Cyclades commence avec Blandine et Magali, deux jeunes adolescentes s’extasiant devant la musique hypnotisante du film Le Grand Bleu de Luc Besson, composée par Eric Serra. En écoutant le rythme du synthétiseur et les cris de dauphins, nous voici immédiatement dans une œuvre qui invite à prendre le large et découvrir l’immensité de l’océan.

Cependant, la rêverie de ces jeunes filles laisse place à des années où les trajectoires changent et les amitiés se diluent complètement dans les turpitudes adultes. Blandine, divorcée et submergée par les tracas, déprime dans une vie bien trop propre, où rien ne dépasse, et où la solitude gagne irrémédiablement du terrain. Le scénario présente des personnages, aux caractères opposés, avec aussi une Magali bohème, fêtarde, vivant d’amour et d’eau fraiche, campée par une Laure Calamy investie, pleine de fougue et de dynamisme. Ainsi, les retrouvailles inattendues se muent en cocasseries délicieuses. Bien sûr, cette situation si atypique créé des remous évidents. Pourtant, on passe un agréable moment en regardant cette relation spéciale, à la limite de l’ubuesque, entre frivolité et comportements rigides. L’écriture souligne les différences de tempérament, oppose la dépression à la joie. Ainsi, Les Cyclades raconte une amitié renouée, dont les bienfaits apaisent les maux psychiques. On rit grâce à ce binôme, aux dialogues parfois ciselés, mais l’humour se mélange à un fond scénaristique plus mélancolique qu’il n’y paraît. Le film parle du temps qui passe, des événements de la vie qui font que tout change instantanément, de la nostalgie d’une époque lointaine, de mauvais ingrédients pouvant détruire une belle amitié. La psychologie détaillée de ces deux femmes révèle des failles respectives, et ces instants de vacances servent à les effacer. Film de copines, récit amical, Les Cyclades parle de personnes qui se complètent, apprenne l’une de l’autre, pour ainsi avancer personnellement. Les moments drôles s’ajoutent aux passages plus émouvants, où chacune se livre sur leurs problèmes actuels. Marc Fitoussi met un zeste de dramaturgie dans un film qui se veut pourtant comique. Cela marche, malgré un rythme balbutiant.

Ce long-métrage ensoleillé réchauffe en ces temps pluvieux. Les paysages sont magnifiquement filmés. Nous prenons aisément place dans cette promenade au cœur des paysages grecs, humectant alors le parfum d’un été chaud et celui des vacances où l’on oublie tout. N’évitant pas les clichés sur les Grecs présentés comme des beaux Apollons, et une vie estivale rythmée par des fêtes enivrées au son d’une disco entêtante, le film se perd souvent dans ces représentations caricaturales. Finalement, ces pérégrinations festives et amoureuses ont au moins l’objectif de recoller les morceaux d’une relation interrompue. Le duo formé par les deux actrices manque néanmoins d’équilibre, entre une Laure Calamy épatante, enjouée, imposant sa présence, et une Olivia Côte qui se trouve plusieurs crans en-dessous. L’interprète, qui retrouve sa collègue féminine après Antoinette dans les Cévennes, peine à donner le change dans une composition contrastée de femme anxieuse et dépressive. Cela n’empêche pas de voir un duo déséquilibré, entre rigidité et légèreté, mais savoureux, comme quoi ce qui ne se ressemble pas peut s’assembler. Ce film permet de réfléchir sur plusieurs points, sur le sens de l’existence, sur la solidité d’une amitié, et comment faire pour l’entretenir convenablement. Dans ce jeu d’amitié, Kristin Scott-Thomas apporte un peu de sérieux, avec un rôle intéressant, qui dit que la vie ne tient qu’à un fil, qu’il faut préserver les moindres et précieuses relations.

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RÉALISATEUR :   Marc Fitoussi
NATIONALITÉ : Française
GENRE :  Comédie
AVEC : Laure Calamy, Olivia Côte, Kristin Scott-Thomas
DURÉE : 1h50
DISTRIBUTEUR : Memento Distribution
SORTIE LE 11 janvier 2023