Les Chroniques de Poulet Pou : retour sur The Fabelmans de Steven Spielberg. A sort of homecoming

A sort of homecoming. Je ne sais pas si j’ai envie de me lancer dans un long blabla sur la chose. C’est qu’il y a eu déjà tellement de blablas — tout le monde a eu le temps de voir le film quinze fois avant qu’il sorte en salles. Je ne critique pas, hein, je constate. Je ne sais pas non plus si mon accroche U2 est pertinente. Spielberg était, ou n’était-il pas, le U2 du cinoche, avant de devenir, je ne sais pas, une sorte de Radiohead — traduction, un classique moderne intouchable. Mais foin de pop-rock de mes deux, parlons piano, puisque la mère du héros — la vraie héroïne du film, en réalité — est pianiste. Or quel pianiste se laisse pousser les ongles, je vous le demande. Me revient à l’esprit cette publicité où Beyoncé faisait mine de pianoter avec des faux ongles de whatmille centimètres. Cependant me reviennent aussi les enregistrements des sonates de Beet par Claudio Arrau, où se fait entendre un incessant cliquetis qui ressemble à ce qui se passe dans le film, à la scène dite ‘’des ongles’’. Maman manucurée interprète devant la famille réunie au salon la première sonate (en fa mineur, op. 2 no. 1) de Beet. Voyez fifils être le seul à se sentir terriblement angoissé, à se mettre à la place de l’artiste. Stress qui se traduit par un seul détail, le tressautement de sa jambe.

C’est souvent un détail qui magnifie les scènes, cependant en sortant de la séance où je me suis rendu avec des amis, il y avait consensus sur le ressenti d’une certaine lourdeur. Relative, car c’est un beau film. Une manière de retour à la maison, donc, qui contrairement à chez Bono, est d’une pudeur constante — ou d’une impudeur feutrée, je ne sais pas. Mais qui dure aussi deux heures et demie. C’est super bien fait et bien rempli, mais on aurait peut-être parfois préféré que Spielberg coupe, et qu’au lieu de tout montrer, il nous laisse imaginer. Je pense à la séquence clé, où l’observation des images du film de vacances qu’il est en train de monter en révèle au héros le terrible secret. N’y a-t-il pas tout à coup trop d’images, comme si Spielberg n’était pas sûr qu’on eût compris à la première — voire depuis longtemps avant. De même, les scènes avec l’oncle Boris et John Ford sont très bien, mais font doublon. Et quand le candidat attend dans l’antichambre du bureau de son idole, le travelling circulaire qui énumère les affiches des hits de Ford, pour s’arrêter comme par hasard sur celle de Liberty Valance, n’est-il pas un peu épais et fabriqué. Au fond, ce n’est pas que Spielberg prenne son spectateur pour un demeuré — il lui fait confiance pour repérer les détails cruciaux —, c’est qu’il tient à ce qu’il jouisse du spectacle un maximum. Un dernier mot sur le fameux conseil de John Ford, j’ai beau vouer un culte au borgne numéro un d’Hollywood, je vous avoue que cette histoire d’horizon surtout pas au milieu, je trouve ça un peu idiot depuis que j’ai vu Le Fossé de Wang Bing.