Les Chroniques de Poulet Pou : retour sur Babylon de Damien Chazelle. Babil Long

Babil long, rather. Désolé pour le jeu de mots pourri façon Masque et la Plume, je suis un peu las. Vous vous dites, maso le mec, il n’avait aimé ni Whiplash (AKA le travail c’est la santé), ni La La Land (AKA le travail libère), mais il va quand même voir cette croûte-là (AKA le travail, on s’en fout en fait, le talent coco tu l’as ou tu l’as pas). C’est que votre humble serviteur ne peut rien refuser à la personne chère à son cœur, soudain prise d’une envie irrépressible de gros film américain — mais pas Avatar, faut pas déconner. Résultat, dans Babylon il y a une image d’Avatar, la lose. La lose suite, le personnage le plus sympa (ou le moins relou), avec celui de Brad Pitt — sorte de John Gilbert, style Dujardin dans The Artist, en plus déjanté —, est une chroniqueuse ciné snob, ’’I knew Proust, you know’’, qui utilise le même gimmick à base d’humble serviteur que votre humble serviteur. Remboursez. Enfin bref, babil long, pourquoi, vous n’êtes pas sans savoir que ça dure trois heures, du reste le film annonce tout ce qu’il y a d’honnêtement la couleur, en présentant dès les premières images, petit a, un obèse, petit b, un éléphant. Et pour remplir les volumes, il y a cette drôle d’idée, qu’il faut toujours tout appuyer. Dans un accès fellinien (ferrerien, plutôt), l’éléphant fait, sous un prétexte fallacieux, caca sur la tête d’un quidam. Or, au lieu d’un jet d’excréments, nous en sommes gratifiés de deux ou trois. Idem quand Margot Robbie vomit. Lorsque, dans une scène un peu subtile (si, ça existe), un personnage noir — lui aussi est sympa, d’ailleurs, on aurait aimé le suivre un peu plus — doit se passer la figure au cirage, la caméra s’attarde sur la boîte et son contenu, non pas une suffisante fois, mais deux ou trois superfétatoires. Le principe atteint son paroxysme dans la séquence, très exercice de montage, où une simili Dorothy Arzner tente de filmer sa première scène parlante — je crois que c’est la sept ou huitième prise qui est la bonne.

Tout est lourd, y compris le désir de burlesque, avec des gags qui tombent à plat et/ou sont sinistres — plus d’un a pour combustible le décès d’un figurant, qui n’avait rien demandé à personne. On conçoit parfaitement que ça serve le propos — derrière le rêve hollywoodien, voyez l’horreur de l’exploitation de l’homme par l‘homme —, mais comme il n’est pas de la plus franche originalité (pour ne pas dire que c’est carrément faisandé), on est encore plus las. Ainsi, face au héros qui pleurniche devant l’écran proustien des souvenirs — bientôt défilera genre bouquet final le futur du cinoche, coucou Avatar —, le spectateur s’emmerde prodigieusement. Vous me direz, la chose avait été réglée dès l’éléphant diarrhéique. Indeed. Finissons-en, il y a des détails qui sont pourtant chouettes, en voici deux. Un, la discussion entre les personnages cool, Pitt vs. la chroniqueuse snob qui lui explique la life, à savoir, pourquoi ce sont toujours les cafards qui gagnent à la fin. Deux, la solution future à leurs problèmes, qui apparaît, sans qu‘ils y prêtent attention (trop occupés qu’ils sont à se mettre sur la gueule), aux protagonistes du tournage de la scène parlante mentionnée plus haut — sous la forme d’un balai évoquant une perche micro. Mais bon, suivons l’exemple de la personne chère à mon cœur, qui a détesté le film, autant si ce n’est plus que moi, et m’a invité au resto après — parlons d’autre chose.