Réouverte en 2019, après des années de travaux, l’une des plus célèbres attractions des parcs Disneyland, Le Manoir hanté, a maintenant le privilège d’avoir sa seconde version cinématographique. N’en déplaise aux amateurs de frissons et de fantômes, le film réalisé par Justin Simien n’est qu’un pur produit commercial, destiné à doper la fréquentation du manoir (The Haunted Mansion aux États-Unis) et honorer une des attractions emblématiques. Avec cette nouvelle production, la firme américaine décide de surfer encore une fois sur la vague des succès d’antan, quitte à négliger l’ambition et se renouveler. En y ajoutant les remakes en live-action (La Petite Sirène, Mulan, Aladdin), l’entreprise confirme son souhait de valoriser les ingrédients de son univers, s’adonnant ainsi à un recyclage permanent. Film moyennement divertissant, Le Manoir hanté devient une grande publicité pour l’attraction qui saura peut-être contenter son public admiratif.
Une mère et son fils décident de faire appel à des soi-disant experts pour les aider à chasser les mauvais esprits hantant leur maison.
Avec cette œuvre, Disney étoffe son catalogue cinématographique, en tentant de divertir et de toucher une audience large, mais reste vain dans ses tentatives de séduction. À force d’avoir tout le temps un œil dans le rétroviseur, la société oublie d’innover et Le Manoir hanté devient davantage un concept marketing, s’adressant prioritairement à un public jeune ou nostalgique.
Ceux qui ont fréquenté auparavant les couloirs de la bâtisse hantée ressentiront une forme de ravissement, avec tous ces fantômes errants et ces recoins poussiéreux ou mystérieux, ainsi qu’une ambiance spéciale, d’autres se rappelleront Le Manoir hanté et les 999 fantômes, sorti en 2003 et avec Eddie Murphy dans le rôle principal, une version déjà peu fameuse. Différente, celle de 2023 restera également dispensable et oubliable, malgré la présence d’une distribution intéressante. Le studio choisit d’engager Justin Simien, un cinéaste connu pour son film Dear White People et la série du même nom sortie sur Netflix. En passant du système indépendant à celui de Disney, le metteur en scène produit un grand écart, et manque sa cible en réalisant ce film de commande où sa touche personnelle se ressent peu, sans doute à cause des nombreuses exigences du studio américain. Difficile d’entrevoir une quelconque empreinte dans cette œuvre complètement formatée pour convenir à des standards commerciaux. Certes, un travail esthétique peut être observé pour reproduire l’atmosphère de la maison hantée, un univers enfantin constitué de nombreuses présences fantomatiques. En cela, Le Manoir hanté correspond en tous points à ce que les visiteurs ont pu percevoir lors de leurs visites, mais cela ne suffit pas pour devenir un bon film. Au mieux, le contenu devient un espace publicitaire pour vanter les atouts de ce lieu culte de Disneyland, sans originalité et intentions véritablement cinématographiques.
Sans réelle histoire captivante, ni rythme, Le Manoir hanté empile les lacunes, échouant aussi dans son objectif de divertissement, une faillite non compensée par une mise en scène absente.
Malgré les quelques efforts consentis, l’œuvre s’enfonce dans l’ennui, un spectacle lisse et lacunaire où seuls les adolescents trouveront du plaisir à regarder cela, et encore. Avec un regard d’adulte, il est bien évident de constater que Justin Simien fabrique quelque chose d’assez informe, impersonnel aussi, et gâche nettement son potentiel vu dans Dear White People. Le cinéaste se prend les pieds dans le tapis de ce manoir, avec un récurrent et préjudiciable manque de rythme. De plus, le scénario, tenant sur deux lignes, se veut extrêmement minimaliste et surjoue la carte du mauvais divertissement estival, avec ces personnages englués dans une lutte contre un méchant fantôme, le tout avec un récit convenant aux plus jeunes d’entre nous, mais les plus âgés resteront de marbre face à ces aventures donnant à peine la chair de poule. Dans ce déluge promotionnel, contenant tout de même des effets spéciaux réussis, les acteurs essaient de sauver ce qui peut l’être. Rosario Dawson, Lakeith Stanfield, Owen Wilson, Tiffany Haddish, pourtant très bons, ne parviennent pas à rehausser le niveau, semblant parfois ne pas y croire vraiment, sans doute fourvoyés dans une production commerciale où leurs talents respectifs s’effacent, peu avantagés par une direction d’acteur absente. Seul Danny DeVito surnage avec un personnage comique et virevoltant. Probablement désavantagé par une première partie interminable, une mise en place laborieuse, et une seconde plus enlevée mais terriblement dénuée d’imagination, Le Manoir hanté continue la longue descente aux enfers cinématographiques de Disney, qui n’a apparemment plus grand-chose à apporter actuellement au cinéma, si ce n’est ajouter des réalisations insipides à son catalogue.
RÉALISATEUR : Justin Simien NATIONALITÉ : Etats-Unis GENRE : Comédie AVEC : Lakeith Stanfield, Rosario Dawson, Owen Wilson, Tiffany Haddish, Danny DeVito DURÉE : 2 h 02 DISTRIBUTEUR : The Walt Disney Company France SORTIE LE 26 juillet 2023