Un coup de maître : pour l’amour de l’art

 

Pour son septième film situé dans le milieu de l’art, Remi Bezançon poursuit sa veine personnelle à mi-chemin entre préoccupations esthétiques et existentielles et comédie grand public. Depuis une vingtaine d’années, il a connu quelques succès populaires comme Le Premier jour du reste de ta vie, Un heureux événement ou Le Mystère Henri Pick. En recrutant Vincent Macaigne et Bouli Lanners, il crée un duo d’amitié où l’alchimie comique entre les deux acteurs s’avère palpable, tout en ne rechignant pas sur les clichés liés au peintre sans inspiration.

Propriétaire d’une galerie d’art, Arthur Forestier représente Renzo Nervi, un peintre en pleine crise existentielle. Les deux hommes sont amis depuis toujours et, même si tout les oppose, l’amour de l’art les réunit. En panne d’inspiration depuis plusieurs années, Renzo sombre peu à peu dans une radicalité qui le rend ingérable. Pour le sauver, Arthur élabore un plan audacieux qui finira par les dépasser… Jusqu’où peut-on aller par amitié ?

Un coup de maître dispose surtout de deux atouts majeurs qui font passer de manière indulgente sur ses faiblesses évidentes d’écriture

Rémi Bezançon aborde souvent des thématiques intéressantes comme le baby blues (Un heureux événement) ou la vraie-fausse imposture littéraire (Le Mystère Henri Pick). Cela donne souvent à l’écran des divertissements intelligents à défaut de grands films. Il en est un peu de même pour Un coup de maître qui, en dépit des promesses de son titre, ne l’est pas véritablement. Son nouveau film se caractérise par une vraie sensibilité à l’art, Rémi Bezançon ayant fait l’école du Louvre. Remake du film argentin éponyme de Mariano Cohn et Gastón Duprat, Un coup de maître enchaîne dans sa première partie les critiques un peu usées sur l’art contemporain et le marchandisation du milieu de l’art, dévoré par le capitalisme financier. Néanmoins, pour ce faire, il manque de la folie et de l’originalité d’un Ruben Ostlund dans The Square, pour marquer les esprits. La deuxième partie, créée autour d’une machination ourdie par l’amitié, fonctionne davantage, tout en continuant à manquer étrangement de mordant.

On y entend néanmoins quelques jolies répliques sur la définition de l’artiste, celui qui ne sait rien faire d’autre, et des séquences assez désopilantes, centrées sur le tandem Macaigne-Lanners, en particulier sur l’espionnage d’une accorte dame peu avare de ses charmes ou la tentative d’empoisonnement d’un témoin gênant. Rien de véritablement inoubliable ne se signalera au spectateur, Rémi Bezançon préférant creuser le lieu commun plutôt que de défricher de nouvelles voies. Néanmoins Un coup de maître dispose surtout de deux atouts majeurs qui font passer de manière indulgente sur ses faiblesses évidentes d’écriture : tout d’abord Bouli Lanners, très bien en artiste dépressif et provocateur et surtout Vincent Macaigne qui, dans un emploi différent du Bonnard qu’il vient d’interpréter, révèle une toute autre facette de son talent immense de comédien en incarnant un agent d’artiste divisé entre un cynisme rémunérateur et une amitié indéfectible. Grâce à eux, par leur humanité débordante, sur la thématique assez inusable de l’amitié réconciliant des contraires, ce film de Rémi Bezançon permet d’occulter les conventions que l’écriture ne parvient pas à dépasser. Une oeuvre attachante sans être définitive.

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RÉALISATEUR : Rémi Bezançon 
NATIONALITÉ :  française 
GENRE : comédie 
AVEC : Vincent Macaigne, Bouli Lanners, Bastien Ughetto, Anaïde Rozam, Aure Atika 
DURÉE : 1h35 
DISTRIBUTEUR : Zinc Film
SORTIE LE 9 août 2023