Un coup de dés : qui embrasse trop mal étreint

Huitième film déjà pour Yvan Attal qui est l’un des rares acteurs français, avec Mélanie Laurent, Roschdy Zem et quelques autres, à réaliser régulièrement des films, en parallèle de sa carrière d’acteur, Un coup de dés cherche à s’illustrer dans le genre du thriller. On ne reprochera pas à Yvan Attal de chercher à se renouveler après une comédie (Ma femme est une actrice), une comédie dramatique à la Sautet (Ils se marièrent et eurent beaucoup d’enfants), un film social (Le Brio), des adaptations littéraires (Mon chien stupide, Les Choses humaines). Cette fois-ci, il tente de s’adapter aux codes du thriller, évoquant lointainement Anthony Zimmer (film dont il tenait le rôle principal aux côtés de Sophie Marceau), ou Ne le dis à personne de Guillaume Canet qui, ô coïncidence, joue dans son dernier film. Le souci vient surtout du fait que Un coup de dés ne manifeste aucune espèce d’inspiration et semble une imitation plaquée des clichés du film noir.

Mathieu doit tout à son ami Vincent : sa maison, son travail, et même de lui avoir sauvé la vie il y a dix ans. Ils forment, avec leurs compagnes, un quatuor inséparable, et vivent une vie sans nuage sur la côte d’Azur. Mais la loyauté de Mathieu est mise à l’épreuve lorsqu’il découvre que Vincent trompe sa femme. Quand la maîtresse de Vincent est retrouvée morte, la suspicion s’installe au cœur des deux couples, accompagnée de son cortège de lâchetés, de mensonges, et de culpabilité…

Un coup de dés où Yvan Attal signe sans nul doute son plus mauvais film, entre platitude des conventions du genre et manque total d’inspiration de la mise en scène

Un coup de dés (étrange titre emprunté à celui de l’un des plus fameux poèmes de Stéphane Mallarmé, Un coup de dés jamais n’abolira le hasard), emprunte la trame filandreuse de son intrigue à des thématiques courantes dans le thriller : amitié, trahison et adultère. Dire qu’Yvan Attal a voulu réinventer le genre serait un peu trop ambitieux, vu que les conventions du genre sont appliquées plus que platement : on devine avec des longueurs d’avance les rebondissements de l’intrigue se focalisant sur un meurtre, beaucoup de jalousie et une fausse accusée.

Ce qui plombe pourtant Un coup de dés, bien plus qu’une intrigue plus que convenue, dans le style sous-Harlen Coben, c’est une voix off redondante, monotone et maladroite, celle d’Yvan Attal lui-même, qui annihile les éventuelles potentialités de son film, au moins autant que la maîtresse de Vincent est neutralisée dans cet imbroglio. Car Un Coup de dés disposait malgré tout de deux atouts : l’apparition d’Alma Jodorowsky dans le rôle de cette maîtresse et une musique assez hitchcockienne et obsédante, signée Dan Levy, le co-leader de The Dø. En dehors de cela, Un coup de dés offre l’étrange spectacle d’acteurs devant gérer un entre-soi qui devient presque le sujet du film : Attal, Guillaume Canet et Maïwenn en pilotage automatique, la trop rare Marie-Josée Croze (autre clin d’oeil à Ne le dis à personne) ne parvenant guère, à elle toute seule, à sauver les meubles.

Yvan Attal n’est pourtant pas manchot dans la réalisation de cinéma. Même si Ma femme est une actrice demeure son meilleur film, en raison de la grâce de Charlotte Gainsbourg et du caractère privilégié des premières fois, Les Choses humaines s’était révélé sinon passionnant, du moins intéressant, plongeant en pleine polémique sur le consentement dans les relations hommes-femmes. Le reste navigue entre maladresses excusables et divertissement de bon aloi. Il en est un peu autrement avec Un coup de dés où il signe sans nul doute son plus mauvais film, entre platitude des conventions du genre et manque total d’inspiration de la mise en scène. Rendez-vous au film suivant qui ne pourra qu’être meilleur.

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RÉALISATEUR : Yvan Attal 
NATIONALITÉ :  française 
GENRE : thriller, drame 
AVEC : Yvan Attal, Marie-Josée Croze, Maïwenn, Guillaume Canet, Alma Jodorowsky 
DURÉE : 1h24 
DISTRIBUTEUR : SND 
SORTIE LE 24 janvier 2024