The Spine of Night : une odyssée en roleplay

Il faut de tout pour faire un monde : y compris des nostalgiques de Xéna la guerrière, Conan le Barbare, et autres jalons populaires de l’heroic fantasy et de la littérature de l’imaginaire. Public par excellence de l’Étrange Festival, les nerds de tous âges et horizons seront gâtés avec The Spine of Night, un long-métrage d’animation projeté pour la 27ème édition de l’Étrange Festival. Fraîchement débarqué du Festival International du film d’Animation d’Annecy, The Spine of Night est au choix un hommage appuyé aux séries télévisées d’heroic fantasy des années 1980, ou alors une partie de jeu de rôle assez générique aux ambitions narratives paresseuses – qui devrait cependant satisfaire les adeptes les plus conservateurs de l’heroic fantasy.

Le Lotus est tombé dans le bas-monde. Fleur bleue aux pouvoirs insondables, secret bien gardé d’une tribu vivant au creux d’un marécage inhospitalier, le Lotus attire toutes les convoitises, objet des luttes de pouvoir les plus meurtrières. De la nuit des temps jusqu’à la fin des âges, un vieux guerrier et une sorcière déterminée compilent l’histoire du Lotus et des guerres sanglantes qu’il a créées, mettant fin à une histoire immémoriale de guerres et de meurtres.

Si les fans de fantasy devraient trouver leur compte dans The Spine of the Night, avec un récit cochant toutes les cases d’une excellente partie de jeu de rôle, les amateurs de cinéma et d’animation risquent malheureusement de sortir déçus de ce qui peine à dépasser les canons de son propre genre.

The Spine of the Night commence comme un film gentiment kitsch, dont les codes de la fantasy très frontaux et les performances d’acteur exagérées au rotoscope ont un certain charme. Le temps de la mise en place de l’intrigue, on se croirait presque dans une cave de geeks surexcités, posant les bases d’une partie de jeu de rôle et d’un univers narratif dont ils auraient la maîtrise totale. Tous les marronniers de la fantasy y passent : les langages anciens mystiques, le monde d’inspiration médiévale, le parler moyen-âgeux artificiel, les cosmogonies et les mythologies aléatoires, le surnaturel décomplexé, la spiritualité diffuse… Mais le film joue toutes ses cartes bien trop vite pour n’être autre chose qu’une série de motifs esthétiques et narratifs génériques, une cascade d’épisode narratifs plus convenus que percutants qui brisent bien vite le potentiel affectif que pouvait avoir le début du film.

Les parti pris esthétiques dans la réalisation de l’animation ne permettent pas non plus de faire sortir The Spine of the Night de la fantasy ordinaire, malgré un certain nombre de choix assez radicaux. L’usage du rotoscope sur quasiment l’intégralité du film (exception faite des scènes d’hallucination et d’effets de flamme) se défend, dans une production qui veut ressusciter le souvenir des séries comme Xena la guerrière en faisant jouer Lucy Lawless dans son rôle principal. Cependant, comme pour toute sa trame narrative, l’animation devient assez vite pesante, avec une physique trop littérale et réaliste dont l’effet principal est malheureusement de donner un aspect carton-pâte à son univers. Un effet malheureusement confirmé par les nombreux décors en arrière-plan, qui, bien que très réussis dans leur atmosphère et leur réalisation, restent comme une étrange toile de fond, un faux-décor à l’arrière plan toujours visible mais toujours artificiel. Assez étrangement, dans sa capacité à avoir l’air faux en permanence, The Spine of the Night se rapproche presque plus du mauvais péplum que de la fantasy, ne parvenant jamais à se départir de ses visuels kitsch au bord du nanardesque.

The Spine of the Night est un film de fantasy très classique, parfois à la limite du conservatisme. Si les fans du genre devraient y trouver leur compte avec un récit cochant toutes les cases d’une excellente partie de jeu de rôle, les amateurs de cinéma et d’animation risquent malheureusement de sortir déçus de ce qui peine à dépasser les canons qu’il prend en modèle.

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RÉALISATEUR :  Philip Gelatt & Morgan Galen King
NATIONALITÉ : États-Unis
AVEC : Richard E. Grant, Lucy Lawless, Patton Oswalt
GENRE : Animation, Fantastique
DURÉE : 1h33
DISTRIBUTEUR : Inconnu
SORTIE LE Prochainement