Silent Shot est une nouvelle exploration des relations féminines par Robin Entreinger (Dreamland, 2014 ; The First Taste, 2022). Tournant autour des thèmes fondamentaux du cinéma, voire des Arts modernes dans leur ensemble, le film renouvelle les méthodes de traitement de ces sujets avec une approche inédite, mais se noie dans sa propre forme.
Bien qu’il ne dure que 60 minutes, Silent Shot se déploie d’abord dans une échelle très classique — avec l’exposition et le conflit principal posés et organisés de manière assez conventionnelle. Alex, une jeune DJ française, est en tournage au Japon pour promouvoir son nouvel album. Et à mesure qu’elle se rapproche de sa maquilleuse et styliste, Mia, leur relation prend une tournure plutôt romantique. Cependant, la structure narrative classique s’effondre ensuite et, au lieu de revivre la tension entre deux personnages féminins mis en avant, Silent Shot questionne si l’histoire a jamais été vraie en fin de compte.
Dans Silent Shot, celle qui prend principalement plaisir à regarder la femme est une autre femme, et cela change cette dichotomie programmatique du cinéma populaire pour une disposition étonnamment nouvelle, où le pouvoir se distribue non pas selon le genre, mais selon la célébrité que possèdent les personnages.
Ainsi, les idées sur les diverses sortes de féminité et de leur division en deux — l’image et la personnalité — sont abordées d’une manière assez peu évidente. Selon le célèbre article de Laura Mulvey, la femme, dans les productions du Hollywood classique, possède la qualité du « to-be-looked-at-ness », tandis que l’homme possède la capacité de regarder, prenant plaisir à contempler la femme. Or, dans Silent Shot, celle qui prend principalement plaisir à regarder la femme est une autre femme, et cela change cette dichotomie programmatique du cinéma populaire pour une disposition étonnamment nouvelle, où le pouvoir se distribue non pas selon le genre, mais selon la célébrité que possèdent les personnages.
Cependant, malgré ce véritable ensemble d’idées cinématographiques, la manière de les aborder dans le film d’Entreinger est sans doute l’aspect le moins convaincant. En effet, alors que l’histoire finit par légitimer toutes les interrogations inévitables sur les failles du scénario en renversant l’intrigue (et à plusieurs reprises), le côté technique de la production demeure insuffisamment modeste par rapport à l’ampleur des idées, et cela durant toute la projection du film.
Comme l’a un jour noté Oscar Wilde : « Tout dans le monde concerne le sexe, sauf le sexe. Le sexe concerne le pouvoir. » Loin des notions de vrai ou de faux, cette phrase a néanmoins parfaitement résumé la vision de la culture européenne à la fin du XIXe siècle. Silent Shot ne vise guère une généralisation de ce genre, mais peut néanmoins être considéré comme telle — affirmant que tout, dans le cinéma, concerne l’image, tandis que l’image elle-même concerne le pouvoir. Ainsi, tout en reflétant avec élégance les racines narcissiques des arts visuels, Silent Shot, cependant, n’a guère trouvé leur parfaite incarnation en lui-même.
RÉALISATEUR : Robin Entreinger NATIONALITÉ : France, Japon GENRE : Drame, Thriller AVEC : Désirée Deboës, Nagisa Chauveau, Loïc Garnier DURÉE : 1h 00min DISTRIBUTEUR : Disparate Films SORTIE LE 24 septembre 2025