Le réalisateur et scénariste belge Domien Huyghe signe avec Sea Sparkle un premier long-métrage envoûtant, entre teen-movie et imaginaire fantastique, qui explore de manière sensible le sujet du deuil et ses conséquences terribles. Emmené par une formidable jeune actrice, ce joli film est une véritable leçon de tendresse et d’affection, empreint d’une certaine poésie humaine.
Léna perd son père dans un accident de bateau. Elle est persuadée qu’un monstre marin est à l’origine de ce drame.
La mer, cette vaste immensité bleue, devient le personnage principal de cette œuvre qui rappelle les peurs et les fantasmes liés au monde marin. Sea Sparkle reconstruit tout un imaginaire, dans un récit joliment fantastique où l’océan devient une source de mystère et de danger.
Les grandes étendues marines servent ainsi de matière pour un scénario qui explore les ressentiments néfastes provoqués par la disparition d’un être proche. Colère, regret, désarroi remplissent le coeur de la jeune Léna, une adolescente remuée par le tragique décès de son protecteur lors de son activité de pêche quotidienne. Domien Huyghe ouvre son film avec une séquence magnifique où père et fille scrutent l’horizon, et cette mer qui les rapproche, cet espace immense qui est pour tous deux plus qu’une passion, presque un art de vivre. Le cinéaste exprime cet attachement viscéral pour un endroit maritime foisonnant de diversité et propice aux loisirs aquatiques. Avec un soupçon de poésie et beaucoup de sensibilité, le film relate cette proximité touchante entre cette jeune fille et son géniteur, avec comme point commun cette attirance pour un univers bleu peuplé de tant de croyances et de superstitions. Alors que l’océan joue un rôle primordial sur la solidité des liens familiaux, il va causer la perte indescriptible d’un pilier important entraînant l’effondrement de tout un cocon. Domien Huyghe explore le thème du décès en reprenant de vieilles légendes maritimes, avec le spectre d’un monstre qui plane sur l’accident tragique. Il rappelle ainsi certaines peurs ancestrales et joue sur l’angoisse due aux différents dangers de la mer. C’est tout un ensemble mystérieux que Sea Sparkle réussit à reconstruire, en suivant la trace d’une probable créature tapie dans les fonds marins. Elle entraîne dans son sillage les curieux esprits envahis par une débordante imagination aux accents fantastiques, fantasmant sur le mythe de la pieuvre. Ainsi, tout le film distille l’ambiance d’une histoire de monstre, invisible, et si représentatif des plus grandes craintes thalassophobes.
C’est un premier film convaincant qui narre avant tout la préjudiciable absence d’un père et le récit d’une Léna cherchant des réponses dans les profondeurs. À travers le regard d’une enfant se dévoile un amour indéfectible.
L’épatante Saar Rogiers est sans conteste une révélation. Inondant de tout son talent les plans où elle apparaît, la jeune actrice insuffle ce qu’il faut d’épaisseur à ce personnage secoué par la colère et la tristesse. Elle nous emmène avec elle dans cette recherche de la vérité, avec ce poids du décès sur ses épaules. Entre rage et désespoir, l’adolescente se retrouve prise dans des tourments indicibles, une quête irréaliste où elle va devoir affronter la mort, accepter la fatalité. Sea Sparkle est en réalité une déclaration d’amour, la preuve d’un lien existant encore, et ce malgré la mort. La gestion du deuil est évoquée, avec la présence fantomatique d’un défunt qui continue de guider Léna. Le scénario saisit les errances psychiques compréhensibles, le manque de repères, la déstabilisation de tout un être, et suit le quotidien d’une adolescente en pleine reconstruction. L’écriture capte également tous les doutes d’une personne vivant dans le passé, les souvenirs, en étant toujours attachée à une figure paternelle qui ne s’efface pas. Sea Sparkle relève d’une poésie humaine à la fois dramatique et émouvante, où la mémoire des morts est ravivée par les vivants, par une Léna désireuse de faire revivre son père, d’honorer son existence. C’est la mer qui a pris l’homme, mais celui-ci reste, imprimant sa présence invisible dans la tête de ceux qui vivent. Sea Sparkle est non pas un film sur un monstre, mais sur une humanité attendrissante qui perdure en dépit des drames.
RÉALISATEUR : Domien Huyghe NATIONALITÉ : Belgique, Pays-Bas GENRE : Drame AVEC : Saar Rogiers DURÉE : 1h38 DISTRIBUTEUR : Les Alchimistes SORTIE LE 13 décembre 2023