Salve Maria : la fascination morbide de Maria

Le film a obtenu la Mention spéciale du jury au Festival du film de Locarno en 2024. C’est le troisième long-métrage de sa réalisatrice depuis 2009. Il est en fait une adaptation du roman de l’écrivaine basque Katixa Agirre intitulé Las madres no et publié en 2018 qui a remporté un vif succès. Maria, qui est écrivaine, doit s’occuper seule de son bébé encore en bas âge, étant donné que son conjoint est fortement pris par son travail de chercheur. Des séances collectives d’allaitement prises en charge par la clinique sont là pour l’aider. Mais Maria s’inquiète – de ce que Eric, son jeune fils, régurgite trop souvent et en trop grande quantité le lait qu’il tète à son sein, s’inquiète de ses cris et de ses pleurs. Et le malaise se fait insinuant chez la mère qui semble peu à peu perdre pied. Tandis que Nico, le père, adopte une attitude optimiste et sans souci ne faisant que souligner par contraste le désarroi de la mère.

Dans le même temps, une affaire fait la une des médias : une mère d’origine française, prénommée Alice, vivant en Espagne, a noyé ses deux bébés jumeaux dans leur bain et une enquête juridico-policière est engagée. La télé et les journaux ne font qu’en parler et Maria est fascinée par ce cas sordide : elle découpe les articles de journaux, regarde les vidéos sur Internet se rapportant à l’affaire. On sent bien qu’un parallèle s’établit entre le cas d’Alice et celui de Maria car au malaise grandissant chez Maria se joint un sentiment de culpabilité de ne pas être une bonne mère, que ne fait que renforcer Nico en reprochant à Maria de ne pas parler suffisamment à son bébé. Elle peine à envisager que l’arrivée d’Eric ne soit pas vécue dans le bonheur. En outre, elle se sent fébrile et irascible.

La réalisatrice décide de faire de ce sujet dramatique un thriller et de nous faire partager maladroitement les angoisses de Maria et sa fascination pour le personnage d’Alice

Maria vit en fait tous les symptômes de ce que l’on appelle la dépression post-partum diagnostiquée chez les mères dans les quatre à huit semaines après l’accouchement. La réalisatrice décide de faire de ce sujet dramatique un thriller et de nous faire partager maladroitement les angoisses de Maria et sa fascination pour le personnage d’Alice qui devient véritablement l’objet d’une quête, la jeune femme allant jusqu’à se rendre sur le lieu de résidence de cette meurtrière pour chercher à la rencontrer. Une quête de savoir et d’inconnu. Mais les effets sont grossiers et la musique envahissante qui tend à souligner voire à provoquer le sentiment d’angoisse chez le spectateur grève le bon déroulement du film, qui s’alourdit d’autant d’une charge gênante.

Globalement, le personnage de Maria nous reste extérieur et ne parvient pas à provoquer l’empathie pourtant essentielle dans ce type de film. Une échappée fantastique – le diable masqué sous la forme d’Alice dictant à l’écrivaine son roman, le bébé chutant plusieurs fois du lit sur la tête inspirant à Maria un passage de celui-ci – semblait pourtant intéressante à creuser si le scénario s’était un peu plus focalisé sur les hallucinations visuelles du personnage, tendant ainsi à rendre compte des symptômes d’une véritable psychose périnatale telle qu’elle est diagnostiquée chez les patientes dans un désarroi extrême comme semble l’être celui de Maria. Reste que l’interprète, Laura Weissmahr, tient parfaitement son rôle, ayant obtenu pour cette raison le Goya 2025 de la meilleure révélation féminine. Il y avait mieux à faire et on s’ennuie un peu mais le sujet a le mérite de l’originalité.

3

RÉALISATEUR : Mar Coll
NATIONALITÉ :  Espagne
GENRE : Drame, fantastique, thriller
AVEC : Laura Weissmahr, Oriol Pla, Giannina Fruttero
DURÉE : 1h51
DISTRIBUTEUR : Dulac Distribution
SORTIE LE 20 août 2025