Red Road est le premier film d’Andrea Arnold, triplement récompensée par trois Prix du Jury au Festival de Cannes. Présentée à la Quinzaine des Cinéastes 2024, l’œuvre permet de redécouvrir le talent de la cinéaste anglaise, qui explosera encore plus par la suite avec Fish Tank. Ce premier essai, concluant, se situe à la lisière du style de Ken Loach et montre les bas-fonds de la société, minés par le désœuvrement et la misère sociale.
Jackie travaille comme opératrice pour une société de vidéosurveillance. Tous les jours, elle observe une petite partie de Glasgow et protège ainsi les gens qui mènent leur vie sous ses yeux.
Red Road est une tragédie urbaine qui mélange réalités sociales et drames humains.
Jackie visionne, scrute ce que filment les caméras de la ville. Ses yeux se braquent un instant. Elle voit un visage tristement connu, celui de l’homme qui a provoqué un accident et causé la mort d’un mari et d’une petite fille. Choquée, la jeune femme décide de le suivre. S’ensuit ainsi un beau film, très dur, mais cependant humain, qui vire progressivement dans la description d’une Angleterre défavorisée. Entre des barres d’immeubles vieillissants, un sol jonché de détritus, des terrains vagues, ce qui est filmé ici est un quartier pauvre, décor adoré de Ken Loach, avec une galerie de personnages qui représente la déchéance, une sorte de Cour des Miracles. Andrea Arnold fabrique une histoire sous tension, ayant quasiment des allures de film de vengeance, et qui possède un fond sociétal, la cinéaste opposant la pauvreté à un milieu plus aisé. Jackie entame un parcours vers ce meurtrier, sans vouloir le pardon ou une forme de rédemption. Red Road est un récit rempli d’antagonismes qui démontre l’une des réalités de la société anglaise. La rencontre entre les deux personnages se fait attendre, tout cela pour faire durer le suspense, puis entre dans une autre dimension, plus puissante.
Red Road est en quelque sorte une version de 21 grammes d’Alejandro Gonzalez Iñárritu, en plus fort.
Un conducteur, sous l’emprise du crack, provoque un accident, des morts, une libération… Le film du cinéaste mexicain parle sensiblement du même sujet, mais Andrea Arnold est une fine analyste des problèmes sociétaux britanniques. On voit dans Red Road ce qui a fait le succès de Fish Tank : cette opposition de milieux et des personnages au bord de l’implosion. Captivant jusqu’à la fin, ce brillant premier essai plonge dans un univers rempli de malsanités, de profils sociologiquement fragilisés, une ambiance électrique et un quotidien rythmé par l’oisiveté ou la débrouillardise. Le style se devine déjà, avec une manière de mettre en scène radicale et un talent naissant qui laissait présager un avenir cinématographique fructueux. Andrea Arnold est maintenant l’une des plus grandes cinéastes du monde. La Quinzaine lui a remis le Carrosse d’or pour l’ensemble de son travail, alors que sa nouvelle production, Bird, concourt pour la Palme d’Or.
RÉALISATEUR : Andrea Arnold NATIONALITÉ : Angleterre GENRE : Drame AVEC : Kate Vickie DURÉE : 1h53 DISTRIBUTEUR : SORTIE LE