Pulse : une relation toxique

Pulse, film électrique aux puissantes sonorités urbaines et première œuvre de la réalisatrice finlandaise Aino Suni, ne laisse pas indifférent. Glaçante description d’une amitié devenant toxique, montrant l’impact de l’emprise psychologique, ce film possède de quoi s’interroger sur les formes de sociopathies présente dans les esprits humains. Personnifiée par une jeune fille aux cheveux verts et au profil inquiétant, cette pathologie antisociale devient le centre de ce récit suscitant effroi et questionnements multiples. Aino Suni donne un nouvel élan à ce thème de la domination, que l’on a si souvent vu sur grand écran. Porté par une Elsi Sloan à la présence aussi hypnotique que malaisante et charismatique, Pulse signe les débuts d’une cinéaste en devenir.

Elina et Sofia, deux sœurs par alliance, vont voir leur amitié apparente se changer en une relation toxique.

Pulse développe d’abord une relation répondant aux normes sociétales, entre deux jeunes femmes se situant au commencement de l’âge adulte, dans une période où les choix vont déterminer l’avenir. Aino Suni filme un rapport normal, en apparence solide. Néanmoins, le tableau idyllique d’une amitié forte s’effrite, révélant alors une relation extrêmement déséquilibrée, entre deux personnes dont les attitudes et les tempéraments si éloignés ne sont aucunement les éléments d’une complicité frappante.

Cette différence notable met à jour les psychologies très opposées de ces personnages, avec une Elina (Elsi Sloan) taiseuse, antipathique, impassible, et une Sofia (Carmen Kassovitz), fragile et influençable. Le scénario de Pulse établit alors un schéma de domination, avec l’influence néfaste de cette rappeuse finlandaise prête à tout pour posséder sa victime. La possession, sujet central dans ce film, évoque la notion d’emprise, mais également un degré aigu de toxicité, ce véritable poison des relations humaines. Ainsi, nous voici happé par une histoire remplie d’angoisse, de peur, où une femme à l’aspect sinistre et effrayant tisse une toile dans laquelle la jeune Sofia, proie facile, ne peut pas s’échapper. Spectateurs impuissants devant une telle montée de violence s’exprimant par les mots et les gestes, nous sommes aussi pris au piège de cette relation cauchemardesque au possible. Aino Suni construit un film imparable, au suspens constant, et la prestation brillante de Elsi Sloan contribue largement à cette sensation de malaise grandissant. L’actrice fait ressortir toute la dangerosité de son personnage, avec des regards dégageant une profonde psychopathie et des comportements d’une froideur absolue. En se lançant dans ce récit, la jeune cinéaste explore le thème de l’amitié toxique, et en fait une œuvre indescriptible, inclassable, virant progressivement vers un thriller d’une brutalité verbale inouïe.

À coups de sonorités et de pulsations musicales, où les paroles traduisent aussi cette emprise, Pulse devient le réceptacle de la folie humaine, où toutes les perversités et les déviances de l’esprit se mélangent, interrogeant sur la véritable nature des relations. De cette amitié naît un antagonisme criant, où les faiblesses sont écrasées par une puissante force, où Sofia devient alors victime d’une relation vampirique la déshumanisant. Entre drogue et fragilité, Pulse est donc aussi l’exemple parfait d’une descente aux enfers, orchestrée par une Elina endossant la fonction de bourreau de l’esprit. Grâce son atmosphère électrique baignant dans des flows de raps magistraux et entêtants, ce film se transforme en une terrible et angoissante plongée dans les méandres labyrinthiques de notre cerveau, pour ainsi livrer le point de vue sociopathique de cette Elina symbolisant toute la toxicité de l’humain. Face à cette protagoniste dévoreuse d’espace, Carmen Kassovitz incarne une fille fragilisée, presque instable. Bien sûr, cette opposition très contrastée répond au schéma classique du thriller. Nous aurions aimé voir plus de conflits entre ces personnages. Le scénario est un peu maigre en rebondissements, tombe parfois dans une certaine facilité. Cependant, le film démontre de réelles qualités filmiques, et un potentiel notable. Ce film marque la naissance d’une cinéaste.

3.5

RÉALISATEUR :  Aino Suni
NATIONALITÉ : France, Allemagne, Finlande
GENRE :  Thriller
AVEC : Elsi Sloan, Carmen Kassovitz
DURÉE : 1h43 
DISTRIBUTEUR : Wayna Pitch
SORTIE LE 22 février 2023