My father’s shadow : un commentaire politique subtil

My Father’s Shadow est le premier long-métrage d’Akinola Davies, le tout premier film nigérian à figurer dans la Sélection Officielle de Cannes, dans la section Un Certain Regard.

L’histoire se déroule alors qu’un père et ses deux fils parcourent Lagos durant une journée, dans l’attente du versement d’un salaire reporté. Suivant la règle selon laquelle plus un événement est inattendu, plus il est chargé de sens, ce voyage improvisé en famille contient bien plus que ce qu’on aurait pu imaginer : une petite trahison fraternelle, de grands secrets familiaux, un passé enfoui et un présent inquiétant, des élections chaotiques et des troubles politiques. Ainsi, il ne s’agit pas seulement d’une succession d’événements réels, mais aussi d’un voyage émotionnel dans le passé familial — avec une introspection inévitable à travers ces expériences partagées.

My Father’s Shadow est un commentaire politique subtil, enveloppé dans une histoire familiale, un format parfaitement adapté à la triste constatation du ressentiment politique que le film semble vouloir transmettre.

Le voyage d’une journée commence de manière naturellement peu dramatique, et ce rythme sans prétention ne monte jamais vraiment en intensité, sauf peut-être lors de l’explosion politique finale. Il maintient néanmoins l’intrigue en éveil grâce aux images surgissant régulièrement du passé du père. Ainsi, le rythme mesuré du film offre un équilibre parfait pour livrer un commentaire politique à travers le prisme d’une histoire familiale, et développe avec élégance l’idée que l’influence du père — qu’elle soit littérale ou incarnée par les forces politiques du pays — est la plus difficile à dépasser, la plus dure à ne pas reproduire. La révélation finale, où le personnage principal répète exactement les mêmes choix de vie faibles que son père, apporte à l’histoire une lucidité triste mais éclairante, au point que le spectateur peut être aussi abattu, mais aussi cathartiquement surpris, que le personnage lui-même.

Aussi captivante que soit l’histoire, elle reste cependant assez univoque en termes de genre. Toutefois, le choix de faire apparaître (presque) uniquement des personnages masculins à l’écran peut être une décision consciente, et refléter l’exclusion de la part féminine de la société nigériane du paysage politique.

Dans l’ensemble, My Father’s Shadow est un commentaire politique subtil, enveloppé dans une histoire familiale, un format parfaitement adapté à la triste constatation du ressentiment politique que le film semble vouloir transmettre. En outre, le fait qu’il s’agisse du tout premier film nigérian à entrer en sélection officielle au Festival de Cannes en fait un point de départ précieux pour ce que son réalisateur, en particulier, et le cinéma nigérian, en général, ont encore à offrir.

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RÉALISATEUR : Akinola Davies 
NATIONALITÉ :  nigérianne
GENRE : drame 
AVEC : Sope Dirisu, Chibuike Marvellous Egbo, Godwin Egbo
DURÉE : 1h34
DISTRIBUTEUR : Le Pacte 
SORTIE LE prochainement