France - Musical - 1h40 - sortie: 23 mai 2022 - RŽalisateur: Serge Bozon - ScŽnariste: Axelle Ropert - Musique: Benjamin Esdraffo - LEGENDE PHOTO: Virginie Efira - Tahar Rahim - AVEC: Virginie Efira: Julie - Tahar Rahim: Laurent -

Les Chroniques de Poulet Pou : Don Juan en comédie musicale plus ou moins cubiste

Don Juan en 2022 n’est plus un méga-porc rebelle et subversif, mais Tahar Rahim, petit gabarit sur bottines à talonnettes, quoique très beau, soit un type qui cache tellement bien son jeu qu’il ne sait plus tellement où il en est — voyez-le ne pas se reconnaître dans le reflet du miroir où il se vérifie. Je ne suis du reste pas du tout certain que le film sache précisément lui-même de quoi il retourne, mais toujours est-il que j’ai passé un moment des plus agréables devant le mystère de cette vraie-fausse relecture du mythe, façon comédie musicale plus ou moins cubiste. C’est que les couleurs, celles des paysages normands ensoleillés comme celles des intérieurs aux lumières tamisées, c’est que le jeu stylisé des comédiens, c’est que les chorégraphies de Christian Rizzo, c’est que la musique — pas forcément toutes les chansons, mais le reste, composé par Benjamin Esdraffo, dont j’avais déjà apprécié les amples mélodies pleines de sentiment, aux luxuriantes orchestrations, dans la BO de Petite Solange d’Axelle Ropert —, tout cela contribue à plonger le spectateur dans un questionnement continuel, où son intérêt est maintenu parce qu’il cherche constamment à comprendre les personnages auxquels il a affaire, mais sans stress, dans un climat ouaté et confortable, où en tous cas je me suis senti bien. Pour ne rien gâcher, c’est plus d’une fois franchement drôle, alors qu’importe si la toute fin a pu me sembler un peu décevante, peut-être moins inspirée.

Soyez prévenus, je vous dis ouaté, confortable et drôle, sachez tout de même que, lors de la séance où je me suis rendu, sur le nombre modeste de spectateurs présents, deux apparemment non corrélés ont démissionné — d’ailleurs en même temps, au moment où Alain Chamfort, AKA le Commandeur, entonne son couplet sur soi-même-Monsieur-Papa, sa vie, son œuvre, ses supposées défaillances éducationnelles qui conduisirent à ce que son infortunée fille devienne la proie d’un vil séducteur. Dommage pour eux, ils ont raté la belle scène où Virginie Efira finit par y aller de son numéro symétrique, alors que le spectateur n’y croit plus, l’infâme quoique ambigu séducteur en question ayant préalablement prétendu qu’elle ne savait pas chanter. Non ti fidar, o misera, di quel ribaldo cor.