Les Chroniques de Darko –  Retour sur Mickey 17 : Une satire mordante de la politique contemporaine

Pour son dernier opus Bong Joon-Ho nous propose un récit de science-fiction. Dans une société en proie aux catastrophes naturelles, Mickey Barnes et son associé Timo – Steven Yeun déjà vu dans Okja (2017) du même réalisateur – sont traqués par un usurier du nom de Darius Blank auquel ils doivent de l’argent, un sadique notoire. Afin de lui échapper, ils décident de s’engager dans un comité destiné à coloniser une planète étrangère sous la férule de l’ex-député Kenneth Marshall. Mickey y fera office de remplaçable, qui signe son contrat sans même en vérifier les clauses, sur qui seront opérées toutes sortes d’expérimentations. Dès qu’il meurt, une imprimante permet de le reproduire tel quel physiquement et mentalement, en tenant compte de sa personnalité et de ses souvenirs. Mickey 17 est donc la 17ème réplique de Mickey Barnes.

Mickey est véritablement un cobaye de la science que personnifie le docteur Arkady dans le film. Celui-ci montre à quel point il est malmené, bousculé, ignoré dans sa qualité fondamentale d’être humain, destiné à tester l’atmosphère de la nouvelle planète ou une nouvelle hormone à son insu lors d’un dîner auquel il est invité à la table de Marshall et de son indéfectible épouse, et première supportrice de son mari (jouée par Toni Collette). Le film est riche en vomissements et autres dégueulis en tous genres. L’histoire nous montre à quelles extrémités peut mener une science inféodée aux intérêts d’une politique privée de toute éthique. Pour seule solution à la menace présumée des rampants, le médecin préconise l’usage d’un gaz mortel plutôt que d’étudier leur comportement ou essayer de communiquer avec eux – ce que ne manquera pas de faire Mickey 17 avec l’aide de l’infirmière Dorothy.

Une comédie bouffonne à plaisir, satirique à souhait – même si elle est faite parfois à gros traits – qui s’en prend aux va-t’en guerre de la politique

Il ne manque pas jusqu’à l’histoire d’amour entre Nasha et Mickey pour romancer le film qui se veut avant tout fait pour un public le plus large possible. La jeune femme accepte le statut de son petit ami, ne semblant même pas s’offusquer de son dédoublement lorsque Mickey 17, qui devait naturellement mourir, est sauvé par les rampants qui l’extraient de la grotte, et alors que les multiples sont selon la loi destinés à être éliminés. On n’est pas à une invraisemblance près. Le récit est riche en rebondissements et autres péripéties qui viennent rythmer le film. Il n’y manque pas non plus un humour parfois féroce, parfois plus simpliste et à la limite du lourdingue – l’épouse de Marshall qui a peur de voir son tapis éclaboussé par le sang de Mickey sur la tempe duquel Marshall pointe son revolver.

Le couple de Marshall et de son épouse est volontairement outré. L’homme est imbu de sa personne, arrogant et jaloux de son statut de leader charismatique menant à l’aventure colonisatrice son peuple. Moue mussolinienne à l’appui, il ferait penser pour un peu – si peu – au président américain actuel. Sa femme lui chuchotant à l’oreille des conseils et lui de reprendre autoritairement la parole pour mieux affirmer son ego – comique. Promettant une orgie sexuelle à ses colons – propre à féconder la nouvelle planète et à multiplier son peuple à l’image du Dieu hébraïque. Prêt pour cela à exterminer le peuple qui l’habite déjà sous prétexte qu’il ne serait pas humain et à l’écraser comme un peuple d’insectes. C’est le prétexte de toutes les guerres, surtout coloniales, où l’autre est nié dans son essence d’être vivant et sensible comme étranger à l’espèce. Une comédie bouffonne à plaisir, satirique à souhait – même si elle est faite parfois à gros traits – qui s’en prend aux va-t’en guerre de la politique, démagogues fous prêt à tout pour satisfaire leur ego. Réjouissant même si ce n’est pas là le meilleur film de son réalisateur.