L’Ecole est à nous : redéfinir l’enseignement

Alexandre Castagnetti choisit d’aborder une nouvelle fois la question de l’école, cinq ans après la sortie de La Colle. Le thème a récemment été évoqué dans La Vie scolaire ou Mauvaises herbes. Avec L’Ecole est à nous, le réalisateur remet en question toute l’utilité du système scolaire français, en pointant du doigt les inégalités et les inadaptations. Le film se veut utopique et émet le souhait de créer une école juste où tout le monde aurait sa chance. Il lance un message alarmant ébranlant quelque peu le schéma éducatif classique, mais se contente de recycler un sujet beaucoup débattu au cinéma, tout en n’évitant pas certains clichés. Les interrogations qui se créent sont multiples. L’école est-elle efficace pour lutter contre la déscolarisation ? Les moyens pédagogiques sont-ils suffisants pour accompagner les élèves vers la réussite ? Le système prend-il en compte les capacités d’apprentissage ?. L’Ecole est à nous tente d’apporter des réponses, et ce, en dépit de quelques maladresses et imprécisions.  

Après une période de confinement, la vie du collège Jean Zay se trouve perturbée par une grève des professeurs, ces derniers revendiquant de meilleures conditions de travail. Durant deux semaines, une nouvelle professeure de mathématiques assure les permanences. Ses méthodes d’enseignement peu académiques vont tout de suite attirer l’attention du principal, qui n’est pas réceptif à cette nouvelle vision de l’éducation. 

Refonder toute l’organisation de l’école, proposer des perceptions différentes, créer un modèle équitable, mettre sur place un système qualifiant et formateur.

« L’école doit être une chance » est un slogan qui est plus que jamais d’actualité. Pourtant, et malgré les efforts fournis, les problèmes persistent, comme la déscolarisation. Le chantier est vaste, et nous savons que l’école ne peut actuellement pas apporter des solutions concrètes à ces problématiques majeures. L’Ecole est à nous est le reflet du déséquilibre scolaire qui règne encore, avec ces jeunes à qui on laisse peu de chances de s’intégrer ou dont on ne reconnaît pas du tout les compétences. Sarah Suco interprète une enseignante qui sort de l’ordinaire, se démarque du corps professoral et de ses conventions classiques. En mettant en place ses techniques inédites et innovantes, elle va mettre l’élève au cœur d’un schéma où chacun va pouvoir exprimer ses qualités. La méthode est simple : laisser les élèves faire ce qu’ils veulent ! Fini les tableaux, interrogations écrites ou devoirs ! Place aux ateliers manuels qui sont une autre manière de prouver ses aptitudes et ainsi se construire un savoir-faire ! Ce qui paraît anarchique au premier abord n’est que la retranscription d’une radicale pensée refondatrice, d’une volonté de réformer profondément une institution vacillante. Le scénario pointe les défaillances d’un ensemble qui n’est pas forcément adapté pour tout le monde, où l’intégration se fait difficilement. Ce petit groupe de jeunes en difficulté est un panel représentatif de l’échec scolaire et du manque d’accompagnement. L’enseignante va progressivement détecter en eux des ressources insoupçonnées, invisibles aux yeux des plus hautes sphères éducatives. A travers les parcours chaotiques de ces adolescents en perte de vitesse et certainement en recherche de reconnaissance, le scénario dévoile les soucis d’orientation, malheureusement assez courants, après la classe de 3ème. Mais la non-reconnaissance des valeurs personnelles ainsi que des facultés d’apprentissage reste encore et toujours prégnante, et ce film ne prouve pas le contraire. En tout cas, L’Ecole est à nous défend l’idée d’une nouvelle stratégie pour enseigner, en donnant une priorité à l’humain et au développement des compétences. Cela contribue surtout à assombrir encore un peu l’image d’une école qui n’est déjà pas bien reluisante. 

Il est évident que l’œuvre véhicule un message recevable, vu l’état du monde enseignant et celui de l’Education Nationale dans sa globalité. Le point de vue du cinéaste se tient, mais changer complètement l’institution semble irréalisable. L’école, et l’éducation au sens large, représentent des vecteurs d’ascension et de réussite. Malgré le degré d’empathie que nous pouvons ressentir pour ces jeunes, il est bien dommage que l’ensemble soit une répétition d’un sujet traité à de nombreuses reprises auparavant. Que pouvons-nous dire qui n’a pas été dit? La Vie scolaire, Entre les murs, et bien d’autres productions, ont étudié ce thème, et L’Ecole est à nous en est presque un résumé. Une impression de déjà-vu se dessine au fur et à mesure, aggravé par des clichés redondants sur les cités toujours représentées comme éléments de la déscolarisation. Ce type de contexte environnemental reste tout de même au centre de tous les longs-métrages traitant de la scolarité. La mise en scène est d’une facture classique, peu transcendante, sauvée toutefois par une analyse réaliste. Comme dans Mauvaises herbes, de Kheiron, le lien semble fort entre la classe et son professeur, signe d’un attachement particulier. Quant à la distribution, les adolescents tirent leur épingle du jeu, en particulier Sofia Bendra, dont le personnage sort du lot grâce à son tempérament de guerrière déterminée à remporter le concours Lépine. 

Bien loin d’égaler le niveau du film de Grand Corps Malade, L’Ecole est à nous reprend quasiment le même regard critique, avec un autre angle de vue, mais qui n’apporte plus grand-chose de neuf dans le traitement du sujet. 

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RÉALISATEUR :  Alexandre Castagnetti
NATIONALITÉ : Française
AVEC : Sarah Suco, Jean-Pierre Darroussin, Oussama Kheddam
GENRE : Comédie sociale
DURÉE : 1h48
DISTRIBUTEUR : UGC Distribution
SORTIE LE 26 octobre 2022