Le Dernier voyage du Demeter : Dracula reste en fond de cale

Produit par Universal, Le Dernier Voyage du Demeter adapte un chapitre du roman Dracula, de Bram Stoker, intitulé The Captain’s Log. Pour mettre en scène ce piège maritime orchestré par une vilaine créature vampirique, le studio choisit André Øvredal , cinéaste ayant réalisé The Jane Doe Identity, avant de se tourner vers une gentillette production horrifique pour adolescents, Scary Stories. Le Norvégien produit exactement ce qu’on lui demande de faire, à savoir un divertissement calibré pour satisfaire un public estival, sans plus. En effet, si cette partie de l’œuvre littéraire culte méritait une adaptation digne, le film, dans sa globalité, ne va pas très loin, avec une horreur restant désespérément au fin fond de ce bateau, ce voyage cauchemardesque pour cet équipage devenant trop sage pour convaincre.

À bord du Demeter, un navire commercial, une mystérieuse caisse en bois contient une cargaison non identifiée. Lors du voyage, une créature s’échappe.

Quand on s’apprête à regarder un film comme Le Dernier Voyage du Demeter, dont le synopsis laisse envisager la lutte de marins contre un terrible ennemi ailé, on peut s’attendre à un spectacle vitaminé, dopé aux effets horrifiques capables de faire frissonner. Toutefois, le formatage opéré pour convenir aux salles obscures annihile tout cela, produisant finalement un résultat simpliste et classique.

Pourtant pas mauvais, si l’on se met à la place des producteurs voulant ratisser un public large, Le Dernier Voyage du Demeter ne prend jamais le risque d’aller loin dans l’horreur, se contentant de produire un film totalement inoffensif, lambda, dans lequel toutes les sensations de peur s’évaporent, si tant est qu’elles soient efficacement produites. André Øvredal reproduit le schéma utilisé précédemment dans Scary Stories, avec notamment une esthétique soignée, une réalisation propre, mais surtout de vaines tentatives d’instaurer une bonne ambiance effrayante. Ce film ne déroge pas à la règle, malgré l’inquiétante présence d’un monstre enfermé dans une caisse. Encore une fois, le metteur en scène réalise un long-métrage insuffisant, incomplet, avec une absence de séquences d’horreur marquantes. Au lieu de cela, cette production se situe souvent à la lisière, s’enfonçant vers un style beaucoup trop sage, gentil, où l’on attend impatiemment le moindre rebondissement. Alors qu’une bonne moitié du film se contente de créer une attente interminable pour les spectateurs cherchant laborieusement cette créature qui se fait attendre, à coups de bruit et de bons vieux ressorts horrifiques, l’autre partie choisit enfin de passer à l’étape supérieure, en montrant des meurtres qui ne procurent pas l’effroi nécessaire, tellement la violence reste en surface. André Øvredal honore sa commande. Certains seront peu regardants sur la qualité du divertissement, toutefois le scenario ne s’aventure jamais plus loin qu’un simple spectacle correct pour une audience jeune.

Le Dernier Voyage du Demeter est, en réalité, une réalisation de facture moyenne, classique, vite oubliable, disons tout juste sympathique, mais vouée à errer dans les profondeurs du streaming.

On ne peut pas dire que l’ensemble vaut le coup d’œil, loin de là, même si ce n’est pas déshonorant. Pas d’ennui, mais simplement une sorte de plaisir coupable à regarder ce combat entre une bête assoiffée de sang et une bande de marins apeurés. On peut se laisser séduire par le décor de ce bateau, reproduit en studio, par le climat nocturne et sombre également. Pour le reste, cette gentille évocation du vampire n’est qu’un modeste ersatz d’horreur et de fantastique n’osant jamais dépasser la frontière du gore, sauf un passage qui réussit à surprendre, un seul durant deux bonnes heures horrifiquement plates et sans saveur. C’est bien maigre, alors que le scénario promettait un affrontement sans pitié et dégoulinant de sang, mais celui-ci coule à peine. À la place, nous voici face à un produit au formatage certain, non dénué d’esthétisme, mais insignifiant, même si l’on peut lui trouver un intérêt, celui de divertir sans prise de tête ou de combler les soirées du samedi soir. Corey Hawkins et Liam Cunningham, bien connu des adeptes de The Walking Dead et de Game of Thrones, sont les principales têtes connues de la distribution, où figure aussi Aisling Franciosi (The Nightingale). Les prestations respectives de ces interprètes sauvent l’honneur, et donne au film des points précieux. Le Dernier Voyage du Demeter fera sans doute découvrir un chapitre méconnu du roman. Cependant, les amateurs du personnage se remémoreront davantage le Dracula de Tod Browning, ou celui de Francis Ford Coppola.

 

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RÉALISATEUR : André Øvredal 
NATIONALITÉ :  États-Unis
GENRE : Fantastique, Horreur
AVEC : Corey Hawkins, Liam Cunningham, Aisling Franciosi
DURÉE : 1 h 59
DISTRIBUTEUR : Universal Pictures International France
SORTIE LE 23 août 2023