La Famille Asada : la photographie sauvera le monde

C’est dans le cadre des Saisons Hanabi que La Famille Asada, quatrième long métrage du réalisateur Ryôta Nakano a été présenté en avant-première. Le film tire directement sa source d’inspiration de l’album photo du photographe japonais Masashi Asada, album lui ayant valu le prix de photographie Kimura Ihei. Cet album est d’une force émotionnelle incomparable et d’une originalité sans nom : chaque photographie figeant un rêve de l’un des membres de la famille de l’artiste.

Pour Masashi, une seule chose compte depuis ses 12 ans : la photographie. Lorsqu’il réalise que dans sa famille, tous ont un rêve secret auquel ils ont renoncé, il décide de les mettre en scène : pompier, femme de Yakuza, pilote de Formule 1. Devant son objectif, tous se prêtent au jeu et vivent leurs rêves de jeunesse. Ainsi, à travers l’accomplissement de sa propre passion il permet à chacun de réaliser leurs rêves de jeunesse et de se rendre compte qu’ils ne sont pas si inatteignables. Lorsque le Japon est touché par un tsunami en 2011, les photos de Masashi prennent une autre teneur.

A travers La Famille Asada, le réalisateur montre au public ce qu’est la photographie pour le jeune Masashi : regarder ceux qui l’entourent de manière arbitraire et émotionnelle. Il capture un moment de vie qu’il transforme en image figée et rend par ce biais accessible au public ce qu’il ne voit que de son regard empreint de subjectivité.

La Famille Asada parvient à représenter l’émotionnalité et la sensibilité extrêmement puissante qui sont celles de la famille, espace de construction et de recherche de soi perpétuel.

L’album du jeune Masashi est certes pensé avant tout comme une œuvre d’art, mais il ne s’y cantonne pas pour autant. C’est en effet un hommage aux membres de sa famille qui ont sacrifié leurs rêves pour nourrir et éduquer le foyer. La Famille Asada parvient à représenter l’ émotionnalité et la sensibilité extrêmement puissante qui sont celles de la famille, espace de construction et de recherche de soi perpétuel.

Le jeune Masashi fait un choix tout autre que sa famille, témoignant des comportements contradictoires et parfois sources de rupture au sein d’une même famille. Il fait en effet le choix de se concentrer sur sa figure d’artiste excentrique aux antipodes de son frère aîné. Un jeu de regard intelligemment mis en scène ressort à l’écran avec splendeur : le public est fasciné devant une interférence de regards entre celui que le photographe porte sur ses proches et le prisme par lequel ces derniers le regardent en retour. Cette scène est maîtrisée avec une aisance frôlant la perfection et il en ressort un flot d’émotions prêt à noyer le spectateur qui ne s’y serait pas préparé.

La seconde moitié de l’album est consacrée à photographier d’autres familles au Japon. Ainsi, toujours sous l’angle de l’émotion, on retrouve à l’écran non des portraits figés mais l’âme des familles que Masashi aura entrepris de dépeindre par la photographie. Le jeune artiste va être confronté lors de l’un de ses périples à la catastrophe de Fukushima. Il va alors aider les rescapés et, dans cet élan, tenter de récolter dans les décombres les photos de familles défuntes afin de les exposer dans une école.

La seconde partie, plus tragique, n’enlève rien à la douceur apaisante du film. Le réalisateur aura réussi à traiter avec agilité et grâce le thème du foyer dans sa complexité la plus profonde, en tant que lieu de construction, d’unions mais aussi de dissonances.

3

RÉALISATEUR : Ryôta Nakano 
NATIONALITÉ : Japon
GENRE :  Comédie dramatique
AVEC : Kazunari Ninomiya, Satoshi Tsumabuki, Haru Kuroki
DURÉE : 127 min
DISTRIBUTEUR : Art House France
SORTIE LE 25/01/2023