Alors qu’à l’occasion de la campagne présidentielles, les débats politiques envahissent les écrans de télévision pour déverser presque chaque soir leur lot de polémiques et de controverses, il s’avérait normal que le cinéma se mette au diapason. C’est chose faite avec La Campagne de France. Contrairement aux débats de haute volée qui se déroule sur les chaînes d’information en continu, il s’agit ici d’une campagne municipale dans un petit village d’Indre-et-Loire, Preuilly-sur-Claise, dont est originaire le réalisateur Sylvain Desclous. Plutôt que d’organiser un suspense artificiel sur le résultat des élections, assez facile à deviner au bout de quelques minutes de présentation des candidats, La Campagne de France s’essaie à dresser un portrait assez juste de la France rurale, dite profonde, et en parallèle de la campagne municipale de mars 2020, à décrire la naissance d’une amitié improbable entre deux êtres a priori fortement dépareillés.
Dans un petit village d’Indre-et-Loire, Preuilly sur-Claise, la campagne municipale bat son plein. De début janvier au 15 mars 2020, trois candidats vont se disputer les faveurs des électeurs : Jean-Paul Charrier, le vétéran, 71 ans, qui ne croit qu’à la méthode du groupe de travail, Patrick Cron, l’outsider, 66 ans, promoteur de la démocratie participative, et Mathieu Barthélémy, 38 ans, le plus jeune, chercheur-entrepreneur aux cheveux longs.
La Campagne de France s’essaie à dresser un portrait assez juste de la France rurale, dite profonde, et en parallèle de la campagne municipale de mars 2020, à décrire la naissance d’une amitié improbable entre deux êtres a priori fortement dépareillés.
Etant donné la moyenne d’âge des habitants de Preuilly sur-Claise, se situant du côté du 3ème, voire du 4ème âge, Sylvain Desclous n’essaie pas de fabriquer un suspense haletant sur les résultats de ces élections municipales de mars 2000. Il essaie surtout d’adresser une lettre d’amour à une France toujours vivace, celle de la campagne, d’où le titre à double sens. Le film traite à la fois de la campagne municipale de Preuilly sur-Claise, mais également et peut-être bien davantage de cette campagne de France, qu’on ne voit guère sur les plateaux de télévision, réservés souvent aux représentants des grandes agglomérations, nombre oblige. A un niveau municipal, voire plus que local, dans un village, ce ne sont guère les préoccupations internationales ni même économiques qui occupent le terrain mais plutôt comment organiser le passage des poids lourds dans le centre-ville. Ni l’immigration ni l’insécurité ne représentent des problèmes à ce niveau, tout au plus se pose-t-on des problématiques écologiques. Le village vit de manière peut-être désuète à l’âge du concret, à une vitesse différente, bien éloigné des thématiques européennes.
C’est certainement pour cette raison que Sylvain Desclous, plutôt que de réaliser un thriller palpitant sur des élections, ce qui aurait été trop attendu, propose en fait une balade décontractée dans un village et choisit de se focaliser sur un alliage improbable, celui de la carpe et du lapin: Mathieu Barthélémy, un jeune (à 38 ans, c’est relatif par rapport aux autres candidats) chercheur-entrepreneur, réservé et solitaire et Guy Buret, un vieux routard de la politique, 73 ans, fort en gueule, contesté, dragueur invétéré et joueur de clairon, qui effectue l’une de ses dernières campagnes politiques. C’est de ce duo, aussi contrasté que celui qui unissait Don Quichotte et Sancho Pança, que va naître l’intérêt, et à la fin l’émotion du film. Une amitié naît sous nos yeux, alors que l’un est aussi démonstratif et peu diplomate que l’autre est lunaire et poétique. Ensemble, ils partent à l’assaut de la politique locale et peu importe le résultat, l’héritage et la transmission sont assurés, par-delà la différence et même l’antagonisme des caractères, car le respect existe entre eux.
RÉALISATEUR : Sylvain Desclous NATIONALITÉ : française AVEC : Mathieu Barthélémy, Guy Buret GENRE : Documentaire DURÉE : 1h27 DISTRIBUTEUR : The Jokers/Les Bookmakers SORTIE LE 9 mars 2022