Dans la foulée de l’immense succès d’Anatomie d’une chute (plus d’un million d’entrées en six semaines, l’un des meilleurs scores de Palmes d’or françaises avec La Vie d’Adèle et Entre les murs), La Bataille de Solférino, le premier film de Justine Triet, ressort en salle. A l’époque, dix ans auparavant, en 2013, ce film avait été sélectionné par l’Acid et particulièrement remarqué par la critique, notant l’émergence d’une nouvelle voix a minima intéressante, d’un talent singulier et inédit. A la revoyure, La Bataille de Solférino supporte bien le passage des années, Justine Triet s’illustrant particulièrement dans la maîtrise de scènes de foule filmées au débotté, le jour-même du second tour de l’élection présidentielle de 2012. Dans la seconde partie du film, une dispute de couple sur fond de divorce et de garde d’enfants, arbitrée par un avocat préfigure même le ton plus dramatique d’Anatomie d’une chute.
6 mai 2012, Solférino. Laetitia, journaliste télé, couvre les présidentielles. Mais débarque Vincent, l’ex, pour voir leurs filles. Gamines déchaînées, baby-sitter submergé, amant vaguement incrust, avocat misanthrope, France coupée en deux : c’est dimanche, tout s’emmêle, rien ne va plus !
La Bataille de Solférino révèle incontestablement un talent incroyable qui allait s’épanouir dans les films suivants de l’oeuvre, exposant une graine de cinéaste qui ne va pas cesser de grandir et d’effectuer des sauts qualitatifs immenses qui vont la mener jusqu’à la Palme d’or.
La Bataille de Solférino s’inscrit dans une sorte de trilogie politique de Justine Triet, après le court métrage En place sur les manifestations anti-CPE (contrat première embauche), et Solférino, moyen métrage sur le second tour de l’élection présidentielle de 2007, filmé du côté des supporters de Ségolène Royal. La Bataille de Solférino est à la fois le point culminant de cette trilogie et l’adieu (provisoire?) au documentaire et à la thématique de la politique, passant le relais à celle du couple qui domine depuis l’oeuvre.
A mi-chemin entre le documentaire et la fiction, La Bataille de Solférino finit en effet par s’installer résolument du côté de la fiction. Certes, Justine Triet filme des enfants en bas âge comme la fille qu’elle avait à l’époque mais n’a pas vécu de séparation douloureuse le jour de l’élection présidentielle. Résultat d’une préparation incroyable, son premier film parvient à restituer avec maestria l’ambiance d’un soir de second tour d’élection, en étant filmé au milieu des sympathisants de toutes les opinions politiques.
S’il fallait une preuve de son incroyable flair, Justine Triet révèle également dans ce premier film des acteurs qui se feront davantage lors des années suivantes : Vincent Macaigne, sans doute le grand comédien de sa génération, Laetitia Dosch et Arthur Harari, le compagnon de Justine Triet, excellent comédien et formidable metteur en scène (Diamant noir, Onoda). Ils sont tous les trois réunis dans la meilleure séquence du film, une dispute tragi-comique entre Laetitia et son ex, Vincent (Triet reprenant les prénoms de ses acteurs pour accentuer la confusion entre la vie et la fiction), arbitrée par un avocat qui ne sait plus guère où se mettre.
La Bataille de Solférino révèle incontestablement un talent incroyable qui allait s’épanouir dans les films suivants de l’oeuvre, exposant une graine de cinéaste qui ne va pas cesser de grandir et d’effectuer des sauts qualitatifs immenses qui vont la mener jusqu’à la Palme d’or.
RÉALISATEUR : Justine Triet NATIONALITÉ : française GENRE : comédie AVEC : Laetitia Dosch, Vincent Macaigne, Arthur Harari DURÉE : 1h34 DISTRIBUTEUR : Shellac SORTIE LE 18 septembre 2013 (reprise 4 octobre 2023)