Guy (Ryan Reynolds) and Molotov Girl (Jodie Comer) in Free Guy.

Free Guy : Un jour sans fin

Cette dernière décennie a vu la reconversion de réalisateurs spécialisés dans la comédie dans une catégorie plus « sérieuse » de films, à-même de leur gagner les louanges de la critique. Certes le phénomène n’est pas très nouveau depuis Charlie Chaplin et Woody Allen. Mais il est assez rare de voir des metteurs en scène qui étaient auparavant spécialisés dans de la pure gaudriole sans prétention se redonner une nouvelle jeunesse en auteurs de films estimables. Les clowns vieillissent comme tout le monde et ont parfois envie, la maturité venant, d’exprimer de nouvelles émotions. Après donc Peter Farrelly (Green Book), Adam McKay (The Big Short, Vice), et Todd Philips (Joker), cette fois, c’est le tour de Shawn Levy de gagner la reconnaissance de la critique. Avec une trame plus ou moins empruntée à Ready Player One de Spielberg, Free Guy recycle avec habilité et un certain brio Un Jour sans fin et The Truman Show, Shawn Levy livrant pour l’été un divertissement idéal, spectaculaire en effets spéciaux (inspirés des trouvailles des jeux vidéos) et plutôt intelligent dans sa réflexion sur l’existence des personnages dépourvus de réalité,

Chaque matin se ressemble pour Guy, employé de banque trentenaire. Il se réveille à la même heure, assiste à la sempiternelle tentative de hold-up, discute avec son ami flic Buddy qui surveille sa banque. Il rêve du grand amour. Un jour, il croise sur sa route Molotov Girl et en tombe éperdument amoureux. Mais ce qu’il ne sait pas, c’est que le décor de sa vie n’existe pas en réalité…

Avec une trame plus ou moins empruntée à Ready Player One de Spielberg, Free Guy recycle avec habilité et un certain brio Un Jour sans fin et The Truman Show, Shawn Levy livrant pour l’été un divertissement idéal, spectaculaire en effets spéciaux (inspirés des trouvailles des jeux vidéos) et plutôt intelligent dans sa réflexion sur l’existence des personnages dépourvus de réalité,

Du côté critique, Shawn Levy ne s’était guère fait remarquer auparavant, sauf par la comédie d’action plutôt efficace Crazy Night, avec Steve Carell et Tina Fey, et la trilogie des Nuits au Musée. En signant quelques épisodes de la série culte de Netflix, Stranger Things, il s’était néanmoins montré un as du recyclage des références, à défaut de montrer un génie de la mise en scène. Ce don du recyclage, on le perçoit également dans Free Guy car non content de saupoudrer son film de citations de jeux vidéo, Shawn Lewy s’est inspiré de grands classiques du cinéma contemporain, Un Jour sans fin, The Truman Show, Ready player one, etc. La réussite du film provient ainsi de cette collision entre le cinéma narratif classique et la virtualité des jeux vidéo où les choses les plus improbables peuvent arriver à l’écran, au même titre que dans le cinéma d’animation.

La rébellion de Guy fait écho à celle d’autres intelligences artificielles comme celle de Dolores dans Westworld. A partir du moment où l’intelligence a été donnée à des personnages, où s’arrête-t-elle? Dans Free City, les PNJ (personnages non joueurs, c’est-à-dire des personnages qui ne sont pas investis par des joueurs dans la vie réelle), sont donc confrontés à des problèmes existentiels : l’illusion de se sentir exister suffit-elle pour exister? Dans ce registre de Candide, Ryan Reynolds se montre absolument excellent, balançant entre ignorance et innocence. Peut-être, à la façon d’un Matthew McConaughey, le verra-t-on entamer dans une prochaine phase de sa carrière une étonnante renaissance en acteur de films d’auteur. Joe Kerry, formidable, assure la transition entre Stranger things et ce nouveau film tandis que Jodie Comer (Killing Eve), assure pour son premier véritable rôle au cinéma, éblouissante dans un double rôle, se montre tout aussi à l’aise entre inventrice de jeux vidéos, frappée de cécité au figuré dans sa vie privée, et créature de rêve dans l’univers virtuel. Free Guy permet d’interroger le vide de la virtualité qui offre à nos vies des doubles rassurants, sans substance ni aspérités. A en interroger le fond, on se trouverait presque à en avoir le vertige, tout comme ce personnage de Guy qui décide de rompre la routine du quotidien.

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RÉALISATEUR : Shawn Levy
NATIONALITÉ : américaine 
AVEC : Ryan Reynolds, Jodie Comer, Joe Kerry
GENRE : Comédie, action, aventure
DURÉE : 1h55 
DISTRIBUTEUR : Walt Disney Company 
SORTIE LE 11 août 2021