Ce n’est qu’un au revoir : quand vient la fin de l’été à Die

Présenté à l’ACID au dernier Festival de Cannes, le nouveau projet de Guillaume Brac, Ce n’est qu’un au revoir, est un documentaire assez court, dépassant à peine les soixante minutes, abordant un moment clé dans la scolarité des élèves (ici ceux de la cité scolaire du Diois à Die, dans la Drôme), à savoir la fin du lycée et le départ vers de nouvelles aventures.

Les amitiés de lycée peuvent-elles durer toute la vie ? Une chose est sûre, dans peu de temps Aurore, Nours, Jeanne, Diane et les autres diront adieu à leur chambre d’internat, aux baignades dans la Drôme, aux fêtes dans la montagne. Louison coupera ses dreads et la petite famille éclatera. Pour certaines d’entre elles, ce n’est pas la première fois et ça fait encore plus mal…

L’incursion de Guillaume Brac dans le genre n’est pas chose nouvelle pour qui connaît bien son cinéma. Depuis ses courts métrages et son premier long en 2013 (Tonnerre), le réalisateur n’a eu de cesse d’alterner fictions et documentaires, le tout formant un ensemble de grande qualité. Il suffit de songer à L’île au trésor (2018) ou plus récemment à A l’abordage (2020) pour s’en convaincre. Ces deux œuvres, qui constituent déjà des sommets de sa filmographie, représentent parfaitement ce qu’est le cinéma de Guillaume Brac, son aspect si précieux et essentiel : un regard bienveillant et tendre sur ses personnages, un côté mélancolique qui perce derrière un aspect festif, une approche esthétique mais aussi politique dans la démarche (sans jamais sombrer dans une quelconque naïveté) et une façon toute personnelle de capter le temps, les derniers instants passés ensemble. Tous ces éléments se retrouvent dans Ce n’est qu’un au revoir.

Pour filmer la fin d’une époque (celle du lycée), Brac a planté sa caméra dans une petite cité scolaire, choisissant de se focaliser plus particulièrement sur un groupe d’adolescents, pénétrant ainsi leur intimité mais sans jamais tomber dans le voyeurisme

Pour filmer la fin d’une époque (celle du lycée), Brac a planté sa caméra dans une petite cité scolaire, choisissant de se focaliser plus particulièrement sur un groupe d’adolescents, pénétrant ainsi leur intimité mais sans jamais tomber dans le voyeurisme. S’intéressant à la toute fin de l’année de Terminale (jusqu’au passage du baccalauréat), le réalisateur entend capter des moments, des tranches de vie, filmant aussi bien l’internat, avec ses chambres et son couloir (lieu d’amusement par excellence) que les salles de classes ou même l’extérieur, avec de très belles scènes de baignades au bord de la rivière, donnant un aspect bucolique et champêtre à l’ensemble. Comme dans tout bon documentaire digne de ce nom, le spectateur est placé en immersion et finit par suivre ces personnages bien réels, à s’y attacher, à comprendre leurs doutes et à identifier les craintes qu’ils ressentent face à ce qui s’apparente à un « grand bond en avant », l’entrée dans le monde adulte qui s’accompagne d’une perte de repères.

Film collectif, Ce n’est qu’un au revoir donne pourtant la parole à quelques personnages en particulier qui se révèlent très émouvants

Film collectif, Ce n’est qu’un au revoir donne pourtant la parole à quelques personnages en particulier qui se révèlent très émouvants, certains possédant parfois une histoire familiale parfois compliquée (ce qui nous est dévoilé de manière pudique et délicate, en voix off). Si la peur de perdre des liens forts d’amitié alimentent à peu près les conversations et les pensées de tous, la plupart, néanmoins, ont une idée de leur avenir et ne sont pas ainsi montrés comme des adolescents hors-sols, détachés de tout engagement citoyen, bien au contraire. Ainsi, la dernière partie du récit s’attache à l’une d’entre-elles et à son combat pour la protection de l’environnement (notamment sa participation aux manifestations à Sainte-Soline). Il est fort probable que cette dimension écologique (très prégnante chez les jeunes générations) soit l’un des points centraux du long métrage, Guillaume Brac ne choisissant pas la Drôme comme cadre du récit par hasard (il y réside avec sa famille). Dans toute son œuvre, les personnages s’inscrivent et évoluent dans la nature et des paysages qui sont omniprésents.

Si le dispositif paraît simple (mais pas simpliste), et si l’émotion semble plus retenue que dans les œuvres précédentes, il n’en reste pas moins que le cinéaste a pris le temps d’écouter et d’entendre ces jeunes

Si le dispositif paraît simple (mais pas simpliste), et si l’émotion semble plus retenue que dans les œuvres précédentes, il n’en reste pas moins que le cinéaste a pris le temps d’écouter et d’entendre ces jeunes. Leur offrant un espace total de paroles (jamais lui n’intervient pour poser des questions, option très wisemanienne), il met ainsi en scène un documentaire touchant et juste dans ce qu’il raconte, mais un peu évanescent parfois et dont on sort en regrettant peut être qu’il ne soit pas plus long, tant on aurait aimé encore suivre ces futurs adultes.

3.5

RÉALISATEUR : Guillaume Brac
NATIONALITÉ : France
GENRE : Documentaire
AVEC : les élèves de la cité scolaire du Diois de Die
DURÉE : 1h06
DISTRIBUTEUR : Condor Distribution
SORTIE Non déterminée