Dario Albertini revient quatre ans après II figlio Manuel, son premier long métrage, avec Anima Bella, deuxième film portant sur les enfants aidants. Le scénario est construit autour de l’histoire d’une jeune fille, Gioia, qui consacre sa vie à aider sa communauté et son père veuf. Si le personnage principal de son premier film luttait contre une mère maltraitante par sa négligence, celui d’Anima Bella se révèle dans son altruisme sans fin et sa lutte pour sauver les autres.
Gioia partage sa vie avec les enfants nés de parents malsains et toxiques. Elle se consacre corps et âme à leur vie, en oubliant la sienne, comme si cette aide était pour elle cathartique. Elle vit pour un père souffrant d’addiction aux jeux et endetté jusqu’au cou, tentant de sauver leur élevage de moutons dans la campagne italienne.
Anima Bella est une bombe de bienveillance qui éclate au visage des spectateurs admiratifs devant une jeune fille entièrement tournée vers les autres, tandis que notre société est davantage remplie d’individus focalisés sur la satisfaction de leur ego, quitte à ne pas voir qu’un monde s’effondre autour d’eux.
Les choix esthétiques apportent beaucoup à ce film. Le format vignette comme la photographie épurée donnent un ton particulier aux paysages et aux visages. On ressent plus que jamais la tristesse des lieux et des hommes qui y ont vécu. On y perçoit la souffrance et le combat, la tristesse et la persévérance, voire l’acharnement. L’acharnement de cette belle Gioia qui s’acharne à aider, à sauver, à se consacrer aux autres. Les scènes de dévouement se multiplient : Gioia qui remplit un bidon d’eau dans la source thermale pendant que les autres se baignent, afin de masser les chevilles douloureuses d’une voisine, Gioia qui invite son père au restaurant après que ses dettes lui ont fait perdre du même coup son exploitation et sa maison. La question persiste tout du long du film : pourquoi s’acharne-t-elle ? Pourquoi s’oublie-t-elle pour les autres ? Anima Bella est une bombe de bienveillance qui éclate au visage des spectateurs admiratifs devant une jeune fille entièrement tournée vers les autres, tandis que notre société est davantage remplie d’individus focalisés sur la satisfaction de leur ego, quitte à ne pas voir qu’un monde s’effondre autour d’eux.
La force du film réside ainsi dans cette jeune femme, dont la puissance de détermination pour sauver son père confine à la folie. Incarnant la force féminine, le courage et le dévouement, ce personnage est presque sacralisé, comme s’il représentait tout ce à quoi les individus vivant en société tendent mais ne parviennent même pas à frôler du bout des doigts. Ce film fait donc ressentir les difficultés mais aussi les espoirs et dilemmes auxquels sont confrontés ces enfants qui, avant même de commencer à vivre pleinement, doivent tout arrêter et vivre uniquement pour surveiller leurs propres parents incapables d’autonomie.
Dans Anima Bella, s’entremêlent tristesse et courage, l’inquiétude de l’amour, voire l’amour de l’inquiétude. Rien ne semble arrêter Gioia pour aider son père, et son dévouement ne semble pas avoir de fin. Ce qui lui importe n’est pas elle, mais les autres, et d’autant plus celui à qui elle doit la vie. Mais la tension se crée entre son désir de vivre et celui d’aider. Tension silencieuse et puissante, qui persiste jusqu’aux derniers instants du film, où le basculement narratif vient frapper le spectateur avec une force harmonieuse qu’il est loin d’oublier.
RÉALISATEUR : Dario Albertini NATIONALITÉ : Italien AVEC : Paola Lavini, Francesca Chillemi, Elisabetta Rocchetti GENRE : Drame DURÉE : 1h35 DISTRIBUTEUR : Le Pacte SORTIE LE 5 octobre 2022