Amours à la finlandaise : un douloureux champ des possibles

La réalisatrice finlandaise Selma Vilhunen, nommée aux Oscars 2012 pour son court-métrage Do I Have to Take Care of Everything, propose avec Amours à la finlandaise une variation certes audacieuse mais plate du sujet des relations conjugales. Le film explore la thèse du polyamour, considéré comme une alternative sérieuse pour les problèmes de couple. Cette pratique peut porter ses fruits, mais le film demeure désespérément sans saveur, alors que le thème comporte une matière riche et diverse.

Juulia découvre que son mari fréquente une autre femme. Elle décide de recourir au polyamour et d’inventer de nouvelles règles.

La cinéaste veut créer un champ des possibles, avec sa propre vision sur cette méthode censée être la clef du bonheur, mais il faut avouer que la platitude du rythme complète un récit bien monotone.

Le titre et le synopsis avaient de quoi susciter l’intérêt, avec la présence de ce polyamour dont on parle peu, mais qui semble assez répandu. On devait ainsi s’attendre à ce que l’œuvre dévoile un quatuor amoureux, avec ce qu’il faut de vigueur et de fougue, et ainsi lever le voile sur un système adulé par de nombreux couples. Certains y voient un bonheur assumé, chose qu’Amours à la finlandaise peine à décrire et à raconter. En effet, Selma Vilhunen ne parvient jamais à construire une histoire fluide, et surtout dynamique, puis choisit d’insuffler un rythme d’une grande mollesse au lieu de reproduire tout l’aspect vibrant de cette forme de relation libre. De ce fait, ce qu’elle filme ici ne parvient pas à véritablement faire croire au bien-fondé du polyamour, avec ce duo qui ne transpire même pas l’alchimie. Le scénario, bien que déficitaire dans la caractérisation des personnages principaux, n’est pas le défaut du film, puisqu’il contenait probablement de quoi fabriquer quelque chose de relativement simple et documenté. C’est sans doute le point de vue de la cinéaste qui pèche majoritairement. Elle reste constamment sur un traitement soporifique qui enlève toute substance à l’écriture. Le binôme formé par Juulia et Mathias symbolise cet effet dormitif et ne respire aucunement le contentement, ni même le moindre soupçon d’euphorie liée au fait d’entretenir plusieurs relations amoureuses. Il existe toutefois l’idée que cette liberté finisse par solidifier une union fragilisée. Cependant, l’ensemble est d’une trop grande fadeur pour que ce récit sorte d’une confondante banalité.

Selma Vilhunen ose narrer une histoire qui aurait pu sortir de l’ordinaire, mais l’imperfection du scénario se double d’un choix de mise en scène qui vient alimenter la platitude constante d’Amours à la finlandaise.

La cinéaste livre une réalisation académique, presque scolaire, avec un classicisme débordant. Les plans sont soignés, l’image est belle… Mais sous ces beaux artifices techniques, il faut avouer que cela est bien trop propre, lisse et linéaire pour convaincre. Tout est mis en scène avec une lenteur manifeste mélangée à cette construction classique. Sous cet emballage d’une propreté évidente, se cache un contenu très convenu qui brille par son coté fragmentaire et inconséquent. La réalisation de Selma Vilhunen manque de piquant, de personnalité, contrairement à ce qu’il fallait pour raconter cela. Stérile dans son argumentation, Amours à la finlandaise contient une morosité ambiante, même si le sujet est assez intéressant. Néanmoins, il tombe rapidement dans une légère mièvrerie ou un sentiment de déjà-vu complet, sans élaborer une profonde réflexion sur les bienfaits du polyamour. Ce long-métrage se situe souvent à la marge de son idée principale. Quant aux interprètes, la complémentarité n’est pas flagrante. En revanche, Alma Pöysti (Les Feuilles mortes) est une talentueuse actrice. Rien que sa présence sauve Amours à la finlandaise d’un potentiel oubli.

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RÉALISATEUR : Selma Vilhunen
NATIONALITÉ :  Finlande
GENRE : Romance
AVEC : Alma Pöysti, Eoro Milonoff
DURÉE : 2h01
DISTRIBUTEUR : Haut et Court
SORTIE LE 3 janvier 2024