Amore Mio : puissance du sujet, faiblesse du propos

Après s’être essayé au format court, l’acteur français Guillaume Gouix (Les Choses qu’on dit, les choses qu’on fait) passe au niveau supérieur avec ce film sur l’absence d’un être cher, décédé dans des circonstances tragiques. Ce thème, étudié maintes fois sur grand écran, reste encore intéressant, et nous pouvions attendre de ce film qu’il nous propose un traitement sortant des sentiers ordinaires. Malgré toute l’implication du réalisateur et une certaine sensibilité, Amore Mio ne convainc que très peu, manquant d’une bonne dose de mélodramatique, et surtout d’un scénario proposant une étude complète de ces sujets dramatiques que sont la mort et ses conséquences. En dépit de maigres passages réussis, l’amour ne transperce pas l’écran jusqu’au spectateur, un peu pantois face à un récit émotionnellement faible.

Guillaume Gouix s’attaque à un sujet douloureux, certainement le plus complexe à gérer, celui du deuil d’une personne aimée. Amore Mio débute en montrant un jeune couple fusionnel, dynamique, s’adorant d’un amour inconditionnel et indestructible. Voici une parfaite entame rassemblant les prémices d’un film puissant.

Cependant, ce qui s’annonce alléchant bascule rapidement (un peu trop) vers le dramatique, avec la mort de Raphaël, tué accidentellement. En effet, après une bien brève introduction d’à peine trois minutes, nous voici plongés dans le quotidien difficile de sa compagne, Lola (Alysson Paradis), prise dans les tourments du manque amoureux, affectée par l’impact de l’absence. Guillaume Gouix ne s’épanche pas sur cette relation brisée par le destin, laissant peu de bribes d’informations concernant cette fusion et cette passion. Bien dommage, car c’est le vibrant moteur, vecteur d’émotions puissantes, et principale mécanique d’un film sentimental. Le cinéaste commet une impasse, préférant se concentrer sur le rapport quasiment conflictuel de Lola et sa sœur (Élodie Bouchez). Le scénario développe ces contacts distants, en utilisant le décès comme un prétexte pour une réconciliation. Dès lors, ce qui devait être un film sur l’absence devient un road-movie familial s’éloignant maladroitement du sujet initial. Ce binôme composé de deux sœurs aux tempéraments bien opposés aurait pu apporter un plus à ce récit, mais fait que Amore Mio devient hors sujet assez rapidement. La mort de ce pauvre Raphaël est reléguée au second plan, malgré les quelques moments où Lola sombre dans une dépression facilement compréhensible. Une seule scène sort du lot, où ce pauvre défunt apparait tel un fantôme, ensanglanté. Unique passage dramatiquement fort, où la présence de la mort domine, puissamment mais brièvement. L’écriture imparfaite ne fait qu’effleurer ce thème si riche. Amore Mio joue la carte de la nostalgie, du souvenir de l’homme perdu, à travers des mots, des lieux, des pensées… mais tout cela d’une manière vaine.

Amore Mio déçoit, et l’on pouvait attendre bien plus que ce que le contenu propose. L’absence d’un véritable fond, solide, défavorise ce film au potentiel malheureusement inexploité. Le choix d’une durée vraiment courte, soit 1 h 20, ne suffit pas pour explorer en profondeur ce sujet et ses problématiques sous-jacentes. Alysson Paradis et Élodie Bouchez forment un bon duo, avec une bonne complémentarité, mais leurs personnages respectifs paraissent inconsistants, et les sources de leurs animosités restent plus que floues. De ce fait, comment arriver à bien s’immerger dans une histoire dont on ignore les tenants et les aboutissants ?.. Reconstruire une relation dans un contexte complexe, voici le choix opéré par ce film, quitte à prendre le risque de dévier de son axe initial. Les deux interprètes, toutes deux parfaites, et une mise en scène soignée sauvent le film, rattrapent à peine une faible proposition scénaristique…Maigre consolation.

1.5

RÉALISATEUR :   Guillaume Gouix
NATIONALITÉ :France
GENRE :  Drame
AVEC : Alysson Paradis, Elodie Bouchez
DURÉE : 1h20
DISTRIBUTEUR : Urban Distribution
SORTIE LE 1er février 2023