Produit par Capricci qui confirme ainsi son souhait de produire des films d’art et d’essai, de bon niveau, au projet atypique, La Troisième Guerre a été sélectionné à la Mostra de Venise. Giovanni Aloi, metteur en scène italien, comme Filippo Meneghetti pour Deux, réalise avec La Troisième Guerre son premier film en France et il s’agit globalement d’une bonne surprise, présentant le quotidien de la mission Sentinelle, en parvenant à nous mettre dans la tête d’un jeune soldat soumis à l’attente et la suspicion permanente, grâce à un Anthony Bajon encore une fois exceptionnel.
Léo vient juste de terminer ses classes et pour sa première affection, il écope d’une mission Sentinelle. Avec sa patrouille composée surtout du sergent Yasmine, son supérieur hiérachique et de son collègue Hicham, une recrue issue des cités, déjà expérimentée, féminin, il arpente les rues de la capitale à l’affût de la moindre menace. Mais plus la frustration augmente, plus la paranoïa guette le jeune soldat…
Une bonne surprise, présentant le quotidien de la mission Sentinelle, en parvenant à nous mettre dans la tête d’un jeune soldat soumis à l’attente et la suspicion permanente, grâce à un Anthony Bajon encore une fois exceptionnel.
Depuis le 11 septembre 2001, et encore davantage le 13 novembre 2015, le terrorisme a succédé aux conflits armés de la Première et de la Seconde Guerres Mondiales, au point de justifier l’appelation de Troisième Guerre contre un ennemi invisible. Même si la pandémie du Covid-19 a remplacé un ennemi invisible par un autre, la situation retranscrite par le film est bien celle d’un Paris quasi-désertique, envahi par la paranoia et l’insupportable attente. En cela, La Troisième Guerre reflète fidèlement les états d’âme d’un soldat débutant qui découvre les plaisirs (rares) et les déceptions (nombreuses) de la vie de militaire, vie devenue depuis la fin du vingtième siècle la caractérisation d’une vocation, voire d’une carrière. Nous assistons ainsi au quotidien de Leo (exceptionnel Anthony Bajon) qui, guidé par son confrère Hicham (Karim Leklou), suit la routine des rondes dans la rue et le métro, les jours de service, puis revient dans sa famille composée de chômeurs en-dehors du système économico-social et flirte dans les boîtes, en jouissant du prestige du militaire.
Cette description précise et très documentaire arrive à maintenir notre intérêt pendant une bonne quarantaine de minutes, voire plus. Cependant, le film finit par pâtir un peu de son manque de péripéties, en se laissant dériver dans l’anecdotique, pendant un ventre mou d’une vingtaine de minutes. Enfin le film repart soudainement pour une vingtaine de minutes, où, faute de terroristes, Leo s’en prend à un duo de vrais-faux Gilets Jaunes qui se sont attaqués à une femme ayant eu le malheur de prendre des photos lors de leur manifestation. Ces vingt dernières minutes haletantes plongent de manière abrupte et saisissante le long-métrage dans un film de genre passionnant à la manière sèche et inexorable de John Carpenter. Il est possible alors de regretter que La Troisième Guerre ne bénéficie pas d’une autre séquence très forte qui l’aurait propulsé vers des sommets dramatiques. L’ensemble est néanmoins largement transcendé par une interprétation de grande classe (Leila Bekhti et Karim Leklou, impeccables) portée par un Anthony Bajon qui montre à nouveau qu’il sait absolument tout faire et tout jouer, de soldat à séminariste, en passant par amoureux transi et loup-garou.
RÉALISATEUR : Giovanni Aloi NATIONALITÉ : française, italienne AVEC : Anthony Bajon, Leila Bekhti, Karim Leklou GENRE : film de guerre DURÉE : 1h30 DISTRIBUTEUR : Capricci SORTIE LE 22 septembre 2021