En compétition à la Berlinale de 2024, le film obtient le prix du meilleur film dans la section Generation 14Plus – section pour adolescents – parmi neuf long-métrages sélectionnés. L’histoire se situe à Madagascar et son réalisateur, dont c’est le deuxième long-métrage, lui-même est malgache. De nos jours, un jeune homme de vingt ans appelé Kwame prospecte clandestinement en compagnie d’un ami sur les berges d’une rivière dont il tamise la terre à la recherche de saphirs. Et rêve de devenir riche pour quitter le pays avec sa mère. Mais le rêve se brise lorsque les prospecteurs sont informés que des étrangers se sont appropriés le terrain sur lequel ils travaillent. Le néo-colonialisme ici subrepticement dénoncé des puissances étrangères qui s’accaparent les richesses de l’Afrique est à l’œuvre. Au cours d’une nuit passée à se cacher des militaires, son ami meurt et Kwame n’a alors d’autre choix que de retourner dans sa ville natale de Tamatave où vit sa mère.
Nous suivons le parcours de Kwame arpentant les rues de la ville à la recherche d’un travail, caméra collant à ses basques, omniprésent à l’écran. La pauvreté des conditions de vie des habitants, et notamment de la mère du personnage principal, apparaît à l’image : mobilier sommaire, coupures d’électricité, routes défoncées et mal entretenues, etc. Le récit s’apparente au Bildungsroman – roman de formation – initié par Goethe, tant il s’attache à nous retranscrire la trajectoire spirituelle et physique du jeune héros, de son désir de fuir son pays et la misère qui y prédomine jusqu’à son implication dans le destin collectif de celui-ci via la proposition que lui fait le leader syndical du port de devenir son informateur dans une affaire de bois de rose volé qui implique son ami d’enfance, jeune homme opportuniste qui a su s’enrichir de trafics en tous genres.
Le film trace une ligne droite continue entre un passé douloureux et un avenir qui se veut prometteur en mettant en scène un présent chaotique en proie aux ambitions personnelles de chacun que vient contrebalancer la volonté forte d’un peuple représenté par son personnage principal.
Car si Kwame est à la recherche d’un avenir pour son pays, c’est aussi parce qu’en se mettant en quête d’un passé enfoui qu’il ignorait – du moins en partie – il découvre l’histoire de son père mort quand il n’était encore qu’un tout jeune enfant, ancien opposant au régime assassiné puis jeté dans une fosse commune par les militaires, et accessoirement musicien chanteur d’un groupe malgache aux accents panafricains. Ainsi, la lutte politique pour l’émancipation du peuple est mise sur le devant de la scène : la radio en voix off multiplie les messages alarmants sur l’état de guerre civile dans lequel est le pays. Le réalisateur filme des manifestations qui ont lieu dans la rue, ponctuées de slogans demandant plus d’égalité et une meilleure répartition des richesses et dénonçant un gouvernement fantoche. On assiste à une véritable prise de conscience du personnage principal évoluant d’une prise de position individualiste à une volonté de partager par son action l’histoire de son pays.
Le film trace une ligne droite continue entre un passé douloureux et un avenir qui se veut prometteur en mettant en scène un présent chaotique en proie aux ambitions personnelles de chacun que vient contrebalancer la volonté forte d’un peuple représenté par son personnage principal. Didactique sans jamais sombrer dans le pédantisme, il donne à voir une jeunesse prometteuse qui ne se laisse pas piéger par les facilités d’une société corrompue et décide d’œuvrer pour le bienfait de la collectivité. Le jeune Delanoël Parista Sambo, particulièrement charismatique dans le rôle de Kwame, joue de façon particulièrement sobre et juste en incarnant à la perfection toute l’honnêteté pleine d’innocence mais aussi la force sereine qui caractérisent son personnage. Un film plus politique qu’il n’en a l’air.
RÉALISATEUR : Luck Razanajaona NATIONALITÉ : France, Madagascar, Allemagne, Maurice, Afrique du sud, Qatar GENRE : Drame AVEC : Delanoël Parista Sambo, Laurette Ramasinjanahary, Joe Lerova DURÉE : 1h21 DISTRIBUTEUR : Sudu Connexion SORTIE LE 24 septembre 2025