Kika : un récit féminin aussi inattendu qu’inspirant

Si vous avez un jour ressenti le besoin de voir une héroïne véritablement puissante, dont le combat se déploie dans la banalité du quotidien, Kika est sans doute le film qu’il vous faut. Repéré cette année dans la Semaine de la Critique du Festival de Cannes, ce long-métrage marque le premier film de fiction (non documentaire) de la réalisatrice franco-belge Alexe Poukine — et c’est une révélation.

L’intrigue suit Kika, une femme d’âge moyen vivant à Bruxelles, où elle travaille dans le secteur social. Par un concours de circonstances inattendu, elle rencontre un homme qui va bouleverser sa vie: elle quitte son mari, s’installe avec cet homme accompagné de sa fille, mais très vite la situation bascule. Seule, enceinte, sans stabilité financière ni logement, Kika doit faire face à une réalité brutale. Les moyens de subsistance qu’elle explore oscillent entre l’extrême tristesse et la folie douce, et c’est dans cette traversée chaotique qu’elle va connaître des moments de lucidité, de prise de conscience, et même de guérison.

Kika est avant tout un film adulte, sur les choix difficiles et la nécessité d’avancer. Loin des récits adolescentes ou des fantasmes d’une vie idéalisée, il propose une trajectoire crue et crédible, où les événements s’enchaînent avec étrangeté mais aussi une certaine fatalité.

Connue jusque-là pour ses documentaires (Sauve qui peut, 2024; Palma, 2020; Sans frapper, 2019), Alexe Poukine maîtrise ici parfaitement l’art de filmer le quotidien. Le rythme est juste, les gestes sont précis, les silences éloquents. Même si le film aborde des thématiques sociales et pragmatiques — argent, logement, parentalité — il ne sombre jamais dans le misérabilisme ni la lourdeur. La mise en scène, fluide et équilibrée, donne à chaque rebondissement une place naturelle, même quand ceux-ci semblent surgir de façon abrupte.

Kika est avant tout un film adulte, sur les choix difficiles et la nécessité d’avancer. Loin des récits adolescents ou des fantasmes d’une vie idéalisée, il propose une trajectoire crue et crédible, où les événements s’enchaînent avec étrangeté mais aussi une certaine fatalité. Kika, en tant que personnage, s’impose comme une figure féminine rare: quoi qu’il lui arrive, elle reste lucide, garde la tête froide, et œuvre pour construire une vie meilleure — pour elle, mais aussi pour sa famille. Une force morale qui ne cède jamais, même face à la banalité pesante de son environnement.

Kika est ainsi une magnifique découverte, un film qui interroge le prix de l’indépendance féminine et le désir d’être avec la personne aimée. Si ce parcours est rude, il donne néanmoins naissance à une héroïne d’un nouveau genre : raisonnable, persévérante, et digne — en somme, une femme «accomplie» au sens le plus noble du terme. Pour citer Jane Austen, on pourrait même dire: a handsome woman.

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RÉALISATEUR : Alexe Poukine
NATIONALITÉ :  France, Belgique
GENRE : Drame
AVEC : Manon Clavel, Ethelle Gonzalez Lardued, Makita Samba
DURÉE : 1h 48min 
DISTRIBUTEUR : Condor Distribution
SORTIE LE 12 novembre 2025