L’utilisation de l’énergie nucléaire est au cœur du sujet du film de Dragan Bjelogrlić, qui retrace un incident ayant eu lieu en 1958. L’Affaire Vinča Curie traite d’un fait divers méconnu. L’incident se produit quelques années après le largage des bombes atomiques sur Hiroshima et Nagasaki et pendant la Guerre Froide, une période où la tension entre les deux blocs était à son paroxysme. Le cinéaste serbe évoque la folie humaine et la tentation de posséder l’arme ultime, dans une atmosphère de course à l’armement.
Octobre 1958, en pleine guerre froide, des scientifiques yougoslaves sont gravement irradiés dans le cadre d’une mission tenue secrète. Ils sont soupçonnés de travailler à la fabrication d’une bombe nucléaire. Rapatriés en France, ils sont pris en charge par le professeur Mathé à l’Institut Curie. Une course contre la montre s’engage alors pour les sauver…
Le film permet de remettre en mémoire un événement survenu à la fin des années 1950, alors que le nucléaire était au cœur des polémiques et des interrogations.
En octobre 1958, un incident provoque l’irradiation importante de scientifiques yougoslaves qui concevaient une bombe. Dès lors, les pauvres irradiés se retrouvent dans un hôpital pour y subir des traitements médicaux dirigés par le professeur Georges Mathé. Aidé par Léon Schwartzenberg, le médecin français s’engage à les sauver. Le film a le mérite de faire toute la lumière sur un accident oublié, survenu dans un contexte de tension croissante alors que l’Union Soviétique s’entêtait dans la fabrication de l’arme de destruction massive. L’incident, au cœur de l’intrigue, introduit une réflexion sur les dangers du nucléaire et les sombres desseins des États prêts à appuyer sur le bouton. Le récit tend à prouver qu’il fallait s’armer coûte que coûte, pour parer à toute éventualité, en négligeant les effets dévastateurs. Les bombardements des deux villes japonaises, décidés par Harry Truman, planent dans l’esprit de ces scientifiques, qui n’ont de cesse de rappeler l’apparition d’une folie destructrice. En cela, L’Affaire Vinča Curie tient un discours plus nuancé que celui d’Oppenheimer, qui traitait assez peu des retentissements. Ici, Dragan Bjelogrlić filme des patients qui ont conscience de la gravité de l’acte, contrairement à l’ambiguïté de l’inventeur de la bombe A.
Malgré une bonne matière scénaristique, le film est desservi par sa mise en scène télévisuelle qui enlève toute force au propos.
Le rendu proposé par Dragan Bjelogrlić n’est pas à la hauteur du sujet, qui devait bénéficier d’un traitement solide. Au contraire, l’impression de visionner un téléfilm se dégage, sans véritables qualités esthétiques. La conduite du récit est très académique, bien qu’elle ait l’idée d’utiliser des flashbacks permettant de comprendre la portée dramatique. La structure narrative se scinde en deux parties : d’abord l’accident puis la conception d’un remède, après étude sur des rats de laboratoire. Cependant, l’ensemble souffre d’un manque criant de force et ne montre ni l’abnégation ni l’aspect contestataire que peut avoir un tel sujet, ici traité avec une mollesse qui efface les enjeux. La mise en scène enchaîne souvent les plans scolaires et se contente de filmer les expressions faciales pour en faire ressortir quelques vaines émotions. La direction d’acteur n’est pas d’une folle ingéniosité, presque aussi marmoréenne que la prestation figée d’Alexis Manenti, très bon acteur au demeurant, mais desservi par la caractérisation lacunaire d’un personnage sans charisme, tout le contraire du vrai Georges Mathé, grand ponte de la cancérologie, mort en 2010. L’Affaire Vinča Curie a un intérêt uniquement grâce à son thème, qui peut faire écho à l’actualité récente. Pour le reste, c’est plus un bon téléfilm, ou un film moyen, qui se laisse regarder pour la reconstitution d’un fait historique.
RÉALISATEUR : Dragan Bjelogrlic NATIONALITÉ : Serbie, Slovénie, Macédoine GENRE : Drame historique AVEC : Dragan Bjelogrlic, Predrag 'Miki' Manojlovic, Alexis Manenti DURÉE : 2h00 DISTRIBUTEUR : L'Atelier Distribution SORTIE LE 5 juin 2024