La section Cannes Classics du Festival de Cannes 2024 proposait la projection d’un film brésilien, Bye Bye Brazil, qui fut présenté lors de l’édition 1980. Carlos Diegues, l’un des principaux cinéastes du Brésil, ne cache pas son admiration pour le néoréalisme italien. Son film est truffé de références à ce style cinématographique transalpin. Une belle découverte qui révèle la vitalité du cinéma du pays de la samba, qui comprend également Glauber Rocha, Bruno Barreto ou Kleber Mendonça Filho.
Une troupe d’artistes sillonne en camion les routes boueuses de l’Amazonie. Ils présentent leur spectacle dans les villages mais doivent faire face à la forte concurrence de la télévision. Un jeune couple désireux de connaître la mer les rejoint. Ayant tout perdu aux jeux, la troupe se sépare et se retrouve quelque temps plus tard à Brasilia, la nouvelle terre promise.
Bye Bye Brazil n’est ni plus ni moins qu’un récit de saltimbanques qui parcourent les routes brésiliennes, en quête d’argent.
Une petite troupe itinérante composée d’un artiste soi-disant magicien et divinateur, d’une chanteuse et d’un homme fort capable de plier de l’acier, décide de traverser le Brésil afin de faire des représentations. Des tours de magie douteux aux capacités divinatoires bien ridicules, tout y passe pour arnaquer les pauvres spectateurs incrédules. Carlos Diegues rend hommage au néoréalisme italien en racontant l’histoire de ces charlatans qui extorquent de l’argent à quiconque vient les voir. Le scénario rappelle La Strada, pour le côté itinérance et cirque, et aussi Il Bidone à cause de cette fumeuse escroquerie organisée pour profiter des naïfs. Bye Bye Brazil est en quelque sorte un film néoréaliste italien tant il reprend les codes du genre, non sans humour. Le chef de la bande, Lord Tzigane, apparaît maquillé, portant des costumes extravagants, tiré à quatre épingles. L’aventure de cette petite troupe qui veut se rendre en Amazonie est un road-movie parfois drôle qui se situe au cœur du Brésil des années 1970, une époque difficile. Le contexte social est explicité : la pauvreté gagne du terrain dans les campagnes. En quelque sorte, ce long-métrage comprend un réalisme social cher aux réalisateurs italiens comme Roberto Rossellini et tant d’autres. Carlos Diegues filme un personnage principal fantaisiste, fantasque, loin de l’image de Zampano, qui se rapproche plus de celle de Gelsomina. Les comparatifs abondent dans ce film qui décrit un Brésil économiquement ruiné.
Bye Bye Brazil est considéré comme l’un des meilleurs films de l’histoire du cinéma brésilien, ce qui est assez juste, vu sa qualité.
Carlos Diegues réalise une production tout à fait abordable, même pour les néophytes. Le scénario est d’une extrême simplicité. Toute l’essence du récit est contenue dans ce voyage ponctué de spectacles qui ont lieu dans des contrées défavorisées. Bye Bye Brazil passe du rire aux larmes en insufflant un burlesque assumé mélangé aux tragédies paysannes comme les mauvaises récoltes. Les Brésiliens ont faim et n’ont plus de quoi vivre. Les prestidigitations hasardeuses créent le contraste avec les situations miséreuses. Tout au long, l’œuvre joue brillamment sur les oppositions, passant du comique au dramatique avec aisance. Elle met en scène le monde de la débrouille peuplé de personnes qui vivotent et sont dans la galère. Brillant sur la forme comme sur le fond, Bye Bye Brazil devient une vision du Brésil pauvre qui tranche avec la richesse des plus hautes sphères. En cela, Carlos Diegues se situe parfaitement dans la lignée de ses collègues italiens. Sa mise en scène est de qualité, bien aidée par une écriture qui privilégie l’espoir à la tristesse.
RÉALISATEUR : Carlos Diegues NATIONALITÉ : Brésil GENRE : Drame AVEC : José Wilker, Betty Faria DURÉE : 1h45 DISTRIBUTEUR : SORTIE LE