Martin Provost n’a jamais caché sa passion pour la peinture. Son plus grand succès cinématographique, Séraphine, inspiré de la vie de Séraphine de Senlis, l’a suffisamment montré. Retour donc pour Martin Provost à un biopic de peintre, plus exactement à celui d’un couple composé d’un peintre, Pierre Bonnard et de son modèle et sa muse, Marthe, devenue elle-même peintre par la suite. En dépit de quelques maladresses de style, découpé en quatre grandes périodes, le biopic réalisé par Martin Provost, bénéficiant d’une interprétation hors pair (Vincent Macaigne, Cécile de France), témoigne d’une belle histoire d’amour qui a su survivre aux années et changé en partie l’histoire de la peinture mondiale.
De 1890 à 1942, de leur rencontre à leur séparation par la mort, l’histoire d’amour complexe et durable entre Pierre Bonnard et son modèle Marthe. Le film retrace sur cinq décennies la vie du peintre français Pierre Bonnard (1867-1947) et de son épouse Marthe de Méligny (1869-1942). Celui que son pays natal surnommait le « peintre du bonheur » a fait le portrait de son épouse, une aristocrate autoproclamée, dans plus d’un tiers de ses tableaux. Considéré comme l’un des plus grands peintres français du xxe siècle, il s’est consacré à l’impressionnisme et à l’abstraction dans ses œuvres. Pour ce faire, Bonnard utilisait des couleurs vives et représentait des scènes de la vie quotidienne. l’artiste trompa Marthe, mais revint toujours vers elle jusqu’à ce qu’il l’épouse.
Bonnard, Pierre et Marthe, grâce à son ambition historique, sa densité passionnelle et sa distribution de qualité, offre donc un joli témoignage sur une grande histoire d’amour de peintres à travers les années.
Sélectionné pour la première fois à Cannes Premiere, Martin Provost revient donc aux sources de son plus grand succès: l’amour, la peinture et le travail du temps. Les périodes se recoupent en partie d’ailleurs avec l’histoire de Séraphine qui se déroule de 1912 à 1932. Le souci de reconstitution historique est louable et plutôt accompli dans le film, même si quelques maladresses de mise en scène figent un peu l’ensemble. Globalement, Martin Provost gagne plutôt son pari sur la durée, en particulier lors du chapitre se déroulant à la fin de la Première guerre mondiale,
Le film se débat un peu entre une volonté de spontanéité renoirienne ou pialatienne et un caractère académique, légèrement rigide et figé. Cette dichotomie stylistique se retrouve en ligne de partage par rapport aux acteurs, Macaigne (aminci pour le rôle) et De France (d’une belle sensualité), le couple principal, parvenant à donner vie à leurs personnages, ce qui procure une bonne partie de la valeur du film, rejoints par Anouk Grinberg et André Marcon. D’autres sonnent malheureusement plus faux et désynchronisés par rapport à l’époque, comme Stacy Martin.
Le sujet du film dépasse le simple biopic car il interroge la place de la femme d’un artiste, voire celle de la femme tout court, dans la période fin du 19ème siècle-début du 20ème. D’une certaine manière, Marthe jouait un rôle précurseur dans sa manière de voir le couple et de se situer par rapport à son mari, finissant d’ailleurs par peindre elle-même. Cette description d’une femme en avance sur son temps permet à Bonnard, Pierre et Marthe, de prendre une certaine dimension, accrue en particulier par les quatre chapitres que le film traverse, mine de rien. On se trouve certes assez loin de Pialat donnant une dimension fortement existentielle à Van Gogh mais l’histoire d’amour, un peu trop naïve au début du film, finit par toucher, voire émouvoir au bout du compte, en montrant que le lien d’amour dépasse la simple satisfaction physique.
Bonnard, Pierre et Marthe, grâce à son ambition historique, sa densité passionnelle et sa distribution de qualité, offre donc un joli témoignage sur une grande histoire d’amour de peintres à travers les années.
RÉALISATEUR : Martin Provost NATIONALITÉ : française GENRE : biopic, historique, romance AVEC : Vincent Macaigne, Cécile de France, Stacy Martin, Anouk Grinberg, André Marcon DURÉE : 2h02 DISTRIBUTEUR : Memento Distribution SORTIE LE 10 janvier 2024