Trois ans après #Jesuislà, le réalisateur de La Famille Bélier propose cette fois-ci un film au doux parfum estival sentant bon le sable chaud, la nostalgie et les grandes vacances. De quoi nous réchauffer le cœur et rappeler ces magiques et fugaces instants vécus par tant de vacanciers. À bien des égards, ces moments vus à travers un regard d’enfant ne peuvent que nous remémorer Le Grand chemin de Jean-Loup Hubert, film où l’espièglerie et l’inconscience de l’enfance se mélangent aux histoires d’adultes compliquées. Cet été-là ne parvient pas à égaler ce film, bien qu’il s’inscrive dans la même veine. Sans être parfaite, cette production reste sympathique et sans prétention. Porté par deux jeunes actrices fraîches et authentiques, le film d’Eric Lartigau nous replonge gentiment dans une période enfantine, où le caractère se construit, où les enfants voient le monde d’une manière atypique et décalée. Sous ses airs de vacances où l’odeur florale complète celui de la mer, Cet été-là arrive difficilement à interroger sur la nature des relations filiales et sur un modèle familial déséquilibré.
Dune nous raconte ses vacances, son séjour dans un camping, une atmosphère estivale touchée par un désordre familial. Avec sa copine Mathilde, elle s’amuse, observe, apprend, analyse, filme des moments qui resteront dans sa mémoire d’adolescente.
L’œuvre adopte le point de vue de Dune, jeune fille âgée de 11 ans, s’apprêtant à partir en séjour avec ses parents. Accompagnée par un caméscope avec lequel elle se filme notamment les pieds après une séance de natation, nous comprenons immédiatement que sa vision servira de principal élément narratif pour développer le récit.
Seulement, la fin de l’année scolaire et l’arrivée si attendue des grandes vacances, synonymes de détente ou de retrouvailles, ne semble pas la réjouir, et ce à juste titre. En effet, la famille de Dune retourne dans cette location saisonnière, deux ans après leur précédent séjour, avec l’espoir de retrouver une union familiale perdue suite à une longue période marquée par les discordes et les tensions. Eric Lartigau plante tout de suite le décor, en nous montrant des parents remplis d’une fausse joie, tentant de recoller les morceaux, et une jeune fille peu satisfaite à l’idée de partir en vacances dans ce contexte. À l’aide d’une seule scène dans la voiture les menant jusqu’à ce camping, le metteur en scène décrit une ambiance légèrement délétère, contraire aux humeurs estivales. Le bonheur des loisirs estivaux s’éclipse face à ce sentiment que Cet été-là ne sera pas comme les autres. Le personnage de Dune, interprété par Rose Pou Pellicer, reste l’archétype de la préadolescente désireuse d’une relative indépendance vis-à-vis de ses parents. Cependant, sa vision permet d’étayer le thème du passage à l’âge adulte, rebattu dans d’autres films. Bien que déjà traité, ce sujet bénéficie ici d’un regard frais sur les comportements des adultes. Dune égratigne les attitudes de ses parents, avec lesquelles elle entretient des rapports plus que distants, mais se trouve plus critique envers ce petit monde de saisonniers ouvert aux plaisirs sexuels. Avec son acolyte Mathilde, 9 ans, elle forme un duo savoureux s’interrogeant, non sans drôlerie, sur la question de l’amitié, du sexe, des relations. Eric Lartigau utilise ce binôme pour railler ce passage charnière, avec plus ou moins de subtilité. En effet, certaines blagues pourraient être considérées comme impertinentes, irrévérencieuses. En tout cas, l’entendre dans la bouche d’enfants un peu naïfs produit un effet comique. Joué par Juliette Havelange, Mathilde apporte une touche enfantine face à cette Dune qui s’éloigne progressivement de cet univers-là pour rentrer dans celui de l’adolescence. Cette association piquante est à peu de choses près identique à celle que nous pouvons voir dans Le Grand chemin, où les petits s’amusent à se moquer ouvertement des grands.
Seulement, et ce malgré une sensation de divertissement honorable, l’ensemble souffre du fait que le sujet ait souvent été abordé sur grand écran. L’impression de déjà-vu se ressent fortement avec une argumentation apportant peu de nouveauté. Cité précédemment, Le Grand chemin imprègne grandement ce long-métrage, qui en est presque une copie. Le film en reprend même certains ingrédients scénaristiques, comme ce duo féminin acerbe, avec ce personnage de Mathilde, sorte d’imitation de celui, plus déluré, incarné par Vanessa Guedj à l’époque. Les deux films se rejoignent sur d’autres points, partageant les sujets tels que l’enfance, une critique du monde adulte, une grande irrévérence, et un schéma familial brisé par la perte d’un enfant. Comme le couple Anémone-Richard Bohringer, les personnages incarnés respectivement par Marina Foïs et Gael Garcia Bernal affrontent ce drame, mais survivent grâce à la présence salvatrice des enfants. Plus qu’une œuvre estivale, Cet été-là se mue en une observation des liens familiaux, mais se trouve affaibli par la fadeur des émotions et la faiblesse d’un scénario privilégiant les gamineries inutiles à l’intéressante complexité des relations adultes. Pratiquement effacés par rapport aux malicieuses jeunes interprètes, Marina Foïs et Gael Garcia Bernal pâtissent de cette opposition bancale causée par cette volonté d’insuffler un vent de légèreté juvénile. À trop se centrer sur ces adolescentes, Eric Lartigau perd le fil de son récit, ne réalise pas un film dit familial et produit un résultat ne dépassant pas le simple stade des enfantillages. Eric Lartigau sait provoquer des rires, mais son cinéma ne joue aucunement sur les émotions. De ce fait, on ne peut que constater l’inexistence d’une interrogation nécessaire sur ce désordre familial prégnant, dont les circonstances restent floues et superficiellement explicitées. À force de délaisser cette problématique essentielle, le film ne gagne pas en qualité, restant tout du long assez banal.
RÉALISATEUR : Eric Lartigau NATIONALITÉ : française GENRE : Comédie AVEC : Marina Foïs, Gael Garcia Bernal, Rose Pou Pellicer, Juliette Havelange, Chiara Mastroianni DURÉE : 1h39 DISTRIBUTEUR : Studio Canal SORTIE LE 4 janvier 2023