En réalisant Bros , Nicholas Stoller (Sans Sarah rien ne va, Cinq ans de réflexion, Mes pires voisins) ne cherchait pas à réussir une comédie romantique traditionnelle. Si Bros est souvent présenté comme la première comédie romantique LGBTQ+ produite par un grand studio, c’est en oubliant Love Simon (chez Fox) ou Fire Island (chez Disney). Néanmoins, il demeure parmi les exceptions. Si ce film reste l’une des premières comédies du genre dans l’histoire du cinéma, on peut malheureusement émettre des réserves sur son caractère comique.
Entre sa tendance à parler abondamment et celle à sur-analyser, Bobby est un New-yorkais à la personnalité dynamique et en mouvement. Ce sont ces deux caractéristiques qu’il a mises à profit de la création de son podcast ayant pour thème l’histoire inconnue des gays. Le succès de son podcast lui a permis de décrocher le poste de directeur d’un musée voué à la communauté LGBTQ+. Sa vie professionnelle est donc pour lui une franche réussite. Du côté personnel, Bobby se satisfait de son célibat qu’il revendique, semblant par là-même désactiver les perspectives romantiques. Célibataire, jusqu’à rencontrer le beau Aaron, riche avocat qui fera fondre son cœur. Aaron déteste sa vie, sa profession l’ennuie et le déprime, et les hauts salaires qu’il perçoit ne suffisent pas à son bonheur.
Bros est un film nettement dépassé qui stigmatise les membres de la communauté LGBTQ+, en rassemblant tous les clichés qui leur sont attribués, plutôt que d’en faire une composante naturelle d’un film, comme le sont les couples hétérosexuels.
Voilà donc Bros : une comédie romantique qui se veut inclusive en ayant pour protagonistes deux personnes du même sexe, mais qui bascule trop souvent dans les travers de la gêne et de la marginalisation. Tout est d’emblée excessif, ce qui saute aux yeux de la personne la mieux disposée à ce type de sujets. Pourquoi Bobby est-il obligé d’être passionné par la communauté LGBTQ+ au point d’en faire un podcast puis de travailler dans un musée voué à celle-ci ? Ce film représente ainsi un stigmate, celui des couples homosexuels, et il relève bien davantage de la satire que de la comédie romantique. En se voulant inclusif et précurseur, le réalisateur ne fait en vérité que participer à l’exclusion des homosexuels de la société dans sa globalité. En réalisant un film qui ne cesse d’accumuler des références à la communauté LGBTQ+, il ne fait que l’exclure de la société en en faisant un système à part, lui-même exclusif.
Les blagues se moquant de la communauté et de ses particularités n’ont ainsi rien de drôle. Non, au XXIème siècle, on ne peut pas rire de tout, et encore moins d’un sujet qui attise haine et violence chez certains et qui représente un combat social de tous les jours pour d’autres. Le constat est le même pour la représentation du métier d’avocat offerte par Bros. Doit-on encore verser dans le cliché des avocats, étant des hommes riches mais tristes, ne travaillant que pour l’argent et passant à côté de leurs passions et de leur vie ? Il est temps d’accepter que, ni les homosexuels, ni les avocats, ne rentrent dans la case du profil construit de toutes pièces par la société, réaffirmé au cinéma par des films comme Bros et extrêmement stigmatisant pour ces individus.
La société se trouve actuellement dans un tournant décisif du passage de l’intégration à l’inclusion. L’intégration est définie comme le fait pour une personne appartenant à une minorité de s’adapter et de s’insérer par ses propres moyens dans la société ; l’inclusion, quant à elle, possède une finalité différente qui est la transformation systémique de la société pour que l’ensemble des individus, minoritaires ou non, soient inclus dans la société sans qu’ils n’aient à faire un effort d’adaptation. Or, Bros est un film nettement dépassé qui stigmatise les membres de la communauté LGBTQ+, en rassemblant tous les clichés qui leur sont attribués, plutôt que d’en faire une composante naturelle d’un film, comme le sont les couples hétérosexuels. Bros, au-delà d’être déjà un échec cinématographique patent, constitue en plus un élément aggravant des stigmatisations et exclusions sociales, ce qui ne peut qu’aggraver notre appréciation sur ce film.
RÉALISATEUR : Nicholas Stoller NATIONALITÉ : États-Unis AVEC : Billy Eichner, Luke MacFarlane, Monica Raymund GENRE : comédie romantique DURÉE : 1h54 DISTRIBUTEUR : Universal Pictures International France SORTIE LE 19 octobre 2022