En janvier 2001, sort Le Pacte des Loups, le deuxième film de Christophe Gans, totalisant 5 millions d’entrées et considéré comme un film culte aux États-Unis, une vraie prouesse dans le cadre du cinéma français contemporain. Un casting époustouflant apparaît dans cette réalisation française, réunissant Samuel Le Bihan, Monica Bellucci, Vincent Cassel, Mark Dacascos et Jérémie Rénier. Le 19 mai 2022, une version longue et restaurée en 4K du Pacte des Loups a été projetée au Festival de Cannes en présence du réalisateur.
Le Pacte des Loups s’inspire du récit historique de la Bête du Gévaudan. En 1766, une bête s’apparentant à un mystérieux loup ravage les campagnes faisant d’innombrables victimes. La lutte est rude pour parvenir à identifier la bête : des esquisses en sont faites en rassemblant les témoignages de victimes ayant survécu à son attaque, mais les témoignages sont incertains et parfois contradictoires car empreints du traumatisme des victimes de l’attaque, laissant planer le doute sur l’apparence de la bête. S’il est difficile de l’identifier, il est plus rude encore de mettre fin à la vie de cette arme destructrice. Or, tel(le) la peste ou le choléra, elle terrorise et ravage les rangs des humains avec une extrême virulence. L’affaire revêt progressivement un caractère international et à Paris comme en province, les bouches et les oreilles n’en ont plus que pour cette bête mystérieuse. Le chevalier Grégoire De Fronsac est envoyé dans la région dominée par la bête pour en dresser le portrait. Il est accompagné de Mani, un indien de la tribu des Mohawks.
Le Pacte des Loups ne se définit pas seulement comme un film somptueux et spectaculaire mettant en scène de magnifiques combats, avec comme toile de fond un mythe historique. En fait, toutes les valeurs intellectuelles et humanistes du réalisateur se trouvent condensées dans Le Pacte des Loups.
Ce qui ressort avant tout du Pacte des Loups à la fois dans sa version première ainsi que sa nouvelle version restaurée, c’est la splendeur extraordinaire de son univers et de ses scènes. Le tournage s’est révélé phénoménal dans la mesure où le film se passe entièrement dans un milieu naturel, le faisant ainsi dépendre du climat, de la luminosité ou encore des aléas de la nature. Les loups sauvages tiennent une place centrale dans le film, ce qui a rendu le tournage plus qu’ardu. S’ajoutent à cela d’impressionnantes scènes de bataille et des combats époustouflants, Le Pacte des Loups est en tout état de cause un film hors norme. Ce caractère exceptionnel se trouve sans aucun doute à l’origine de son immense succès en 2001 : Le Pacte des Loups est un film extraordinaire et stupéfiant, un film de genres multiples, à grand spectacle, comme il n’en avait jamais été réalisé en France.
Mais ce qui ressort en 2022 du Pacte des Loups n’est pas uniquement ce qui en ressortait il y a onze ans. En effet, Le Pacte des Loups ne se définit pas seulement comme un film somptueux et spectaculaire mettant en scène de magnifiques combats, avec comme toile de fond un mythe historique. En fait, toutes les valeurs intellectuelles et humanistes du réalisateur se trouvent condensées dans Le Pacte des Loups. Ainsi Mani, Indien Mohawk tout droit sorti d’un western antiraciste de Delmer Daves, symbolise à la fois dans le film l’étranger, les cultures lointaines, le melting-pot, ainsi que les causes environnementale et animale. Cette dernière est d’ailleurs défendue tout au long du film à la fois à travers un regard extrêmement critique porté sur les chasseurs mais aussi par la figure de la bête féroce et destructrice pour laquelle nous finissons par avoir de la compassion et non la crainte qui est pourtant intuitivement ressentie par un humain faisant face à un danger. Si toutes ces valeurs constituant l’âme même du réalisateur se trouvaient bien évidemment dans la version originelle du film, Christophe Gans était véritablement en avance sur son temps avec ce type de préoccupations : en 2001, les spectateurs n’étaient pas nécessairement en mesure de voir tous ces messages et préféraient s’exalter devant la splendeur visuelle du film. Aujourd’hui, la restauration du film permet un regard nouveau sur celui-ci car, même s’il demeure inchangé sur le fond, les générations actuelles pour qui les causes égalitaire, environnementale et animale sont fondamentales, vont se retrouver bien davantage en phase avec Le Pacte des Loups.
Une peur essentielle tenaillait Christophe Gans en restaurant Le Pacte des Loups : toucher au film, l’abîmer et le gâcher pour ceux qui l’ont aimé à sa sortie. Or cette restauration s’avère un pari réussi car la nouvelle version représente en fait une version qualitativement améliorée de la première, sans en atténuer l’impact ni la beauté. Mais au-delà de cela, la restauration va permettre au Pacte des Loups de ressortir en salles et d’être vu par une nouvelle et jeune génération engagée qui va l’apprécier pour des raisons bien différentes de celles qui lui ont valu son succès en 2001. Or, cette nouvelle appréciation n’est pas justifiée par une modification du film en soi, mais par la survenance d’un public différent et se trouvant en phase avec son temps, et étant davantage en mesure de comprendre l’ensemble des messages que le réalisateur a voulu faire passer en 2001 et pour la réception desquels les spectateurs n’étaient tout simplement pas prêts.
RÉALISATEUR : Christophe Gans NATIONALITÉ : Français AVEC : Vincent Cassel, Samuel Le Bihan, Monica Bellucci, Jérémie Renier, Mark Dacascos GENRE : Aventure, Epouvante-Horreur, Historique DURÉE : 2h22 DISTRIBUTEUR : Metropolitan Filmexport SORTIE LE 31 janvier 2001 (ressortie le 10 juin 2022)