Film d'animation - France - Espagne - Belgique - 2019 - sortie:30 septembre 2020 - RŽalisateur et directeur artistique: Aurel - ScŽnariste: Jean-Louis Milesi - Musique originale S’lvia PŽrez Cruz -

Josep : no pasarán!

Persépolis de Marjane Satrapi et Vincent Paronnaud, avait montré la voie quelques années auparavant. Un film d’animation ne concerne pas forcément que les enfants ; il peut aussi être un acte politique, contenir des insultes racistes, des scènes de viol, pour mieux les dénoncer, et donc s’opposer au fascisme des idées. Labellisé Cannes 2020, Josep du dessinateur de presse Aurel (Le Monde, Le Canard enchaîné) surprend, étonne, émeut en dressant le portrait d’un réfugié politique espagnol, Josep Bartoli, artiste peintre et dessinateur. Après avoir vu Josep, on peut s’attendre à une révélation du film d’animation du même ordre que celle de Jérémy Clapin l’année dernière avec J’ai perdu mon corps. L’art contre le fascisme. No pasarán! 

Une jolie leçon de choses politiques, sur la transmission, l’amitié et le devoir de mémoire, qui n’oublie jamais l’écriture cinématographique et fictionnelle.

Valentin ne connaît pas vraiment Serge, son grand-père, toujours alité dans sa chambre et presque mourant. Lorsque Serge refusera de se séparer d’un dessin, Valentin sera amené à l’interroger et à découvrir une histoire rocambolesque qui l’a uni à un artiste peintre et dessinateur, activiste politique espagnol, nommé Josep Bartoli.   

Dès le départ, volontairement aride, on comprend tout de suite que Aurel ne va pas s’adresser aux fans de Walt Disney. En février 1939, la Retirada sert à nommer le phénomène d’exode des réfugiés espagnols sur les plages de Pyrénées-Orientales, après la prise de Barcelone par l’armée franquiste. Un grand-père va opérer un acte de transmission et de mémoire en racontant à son petit-fils la manière dont ces réfugiés ont été parqués par les Français dans des camps. Sans rien surligner, Aurel va montrer comment la xénophobie a engendré l’ostracisme. Les échos historiques sont par conséquent nombreux, des camps de la mort nazis aux habitations provisoires des migrants d’aujourd’hui.   

L’intolérance règne. Et pourtant Aurel montre aussi une forme de miracle, après le premier miracle de la transmission entre générations, celui tout aussi émouvant de l’amitié pouvant exister entre deux êtres apparemment dissemblables, un gendarme français, Serge, le grand-père de Valentin, et Josep, l’artiste réfugié espagnol. Sans entrer dans les détails de l’histoire qui s’avère extrêmement rocambolesque, on y croisera le portrait par dessin d’une femme aimée, Maria Valdès, ainsi qu’une artiste mythique de l’histoire de l’art, Frida Kahlo, et surtout la métamorphose de Josep de réfugié méprisé en artiste reconnu. Cette métamorphose s’accompagne d’une transformation en continu de l’animation du film, passant du noir et blanc charbonneux des camps aux couleurs radieuses du Mexique. Le film s’achève en apothéose par une chanson interprétée par la voix envoûtante et enchanteresse de Silvia Pérez Cruz qui concrétise le Paradis enfin atteint après l’enfer traversé. Une jolie leçon de choses politiques, sur la transmission, l’amitié et le devoir de mémoire, qui n’oublie jamais l’écriture cinématographique et fictionnelle. Enfin, fictionnelle, si on veut, car Josep Bartoli a réellement existé, ce qui n’est pas la moindre surprise de ce film dont le sujet totalement inhabituel pour un film d’animation, fera date.  

3.5

RÉALISATEUR : Aurel
NATIONALITÉ : français
AVEC : Sergi Lopez, David Marsais, Silvia Pérez Cruz
GENRE : Animation, biopic
DURÉE : 1h11
DISTRIBUTEUR : Sophie Dulac Distribution
SORTIE LE 30 septembre 2020, reprise le 19 mai 2021