Austrian actress Romy Schneider in a prompt studio session with Sereny in Rome, Italy, 1971.

Romy Femme Libre : affranchie des autres mais soumise à elle-même

Romy Femme Libre est un documentaire qui retrace la vie de Romy Schneider : d’une ex-princesse autrichienne, fille d’acteurs collaborant avec le régime nazi à un sex-symbol pour de nombreuses générations, Romy nous montre qu’on ne nait pas libre, on le devient. Ambitieuse et fragile, adulée et détestée, l’actrice agit et se prononce librement, sans souci de choquer. Romy, caméra éteinte ou allumée, prouve qu’une femme peut obtenir ce qu’elle veut au même titre qu’un homme. Libre jusqu’au bout, elle refuse de se voir attribuer l’étiquette de féministe, quand bien même c’est tout ce qu’elle incarne.

Romy femme libre est un documentaire avant tout historique. Sur un fond d’images d’archives, la voix du comédien Swann Arlaud raconte. Son enfance, sa vie professionnelle et personnelle, sa mort, tout y est. Tout, ou presque. En effet, on ne peut que saluer ce travail qui est le fruit d’une recherche archéologique pour trouver, trier, ordonner, les vidéos d’époque où Romy parle, raconte, s’exprime. Des interviews et des vidéos spontanées permettent de la voir sous tous ses jours. Si le documentaire retrace très bien cette vie et rend hommage à Romy, apporte-t-il vraiment un regard nouveau sur cette femme comme le prétend la réalisatrice ?  Rien n’est moins sûr. En effet si nous ne pouvons reprocher quoi que ce soit au documentaire en lui-même en ce qu’il remplit parfaitement la finalité qui est la sienne, Romy a toujours été connue pour être cette femme libre, celle qui rompt avec ses amants, ses contrats et ses engagements lorsque cela ne lui plaît pas, celle qui vit pour ce qui la fait vibrer, qui se bat pour ce qui la fait pleurer, et qui joue car elle ne sait s’en passer. Romy sous les projecteurs et sous le feu des scandales, Romy expatriée de son pays natal, Romy Schneider ni plus ni moins, telle qu’elle a toujours été présentée. On regrettera alors ce « visage nouveau » de l’actrice promis dans ce documentaire, alors qu’il ne fait que, certes très bien, montrer ce qui a déjà été vu.

Le documentaire est inspiré de l’exposition incontournable dédiée à Romy Schneider, actuelle à la Cinémathèque française. Si les adaptations de livres au cinéma sont fréquentes, celle d’une exposition est presque du jamais vu. C’est une innovation en la matière, mais cela n’est pas forcément à reproduire. En effet, l’intérêt d’une exposition réside en partie dans l’espace et la liberté du visiteur. Celui-ci peut se déplacer dans les différents espaces,  suivre la chronologie ou créer sa propre chronologie. En d’autres termes, il est libre comme Romy l’était, et peut se délier du cadre qui lui est posé, ou plutôt proposé. A cet égard, il est un peu regrettable d’avoir simplement repris le support de l’exposition en le transposant sous la forme d’un documentaire. Le message que transmet le fait de transférer une exposition en un documentaire enfermé dans le temps et dans l’espace est aux antipodes de la liberté que Romy a toujours revendiquée, et nous le regrettons.

3.5

RÉALISATEUR :   Lucie Cariès, Clémentine Deroudille
NATIONALITÉ : française 
AVEC : Romy Schneider 
GENRE : Documentaire
DURÉE : 1h31
DISTRIBUTEUR : France Télévisions 
SORTIE LE diffusion sur France 2 en juin 2022