Revoir Paris : après un vendredi 13…

Tout comme Les Cinq diables ou Un beau matin, Revoir Paris fait partie de ces trois films de cinéastes françaises qui étaient particulièrement attendus en Sélection Officielle lors du Festival de Cannes 2022 et se sont finalement retrouvés à la Quinzaine des Réalisateurs. Dans le cas de Alice Winocour, juriste qui s’est réorientée vers le cinéma, elle sort d’un succès d’estime, Proxima, bénéficiant d’une distribution internationale (Eva Green, Matt Dillon), et a conçu le projet de Revoir Paris inspiré par les souvenirs de son frère, rescapé de l’attentat du Bataclan. Sujet porteur, tout comme dans Novembre de Cédric Jimenez, vedettes en vue (Virginie Efira, Benoit Magimel), cinéaste sensible et attentive (Alice Winocour depuis Augustine), tout concourt à faire de Revoir Paris un film nécessaire pour effectuer le deuil d’une période traumatique que la France n’est pas encore près d’oublier.

A Paris, Mia est prise dans un attentat dans une brasserie. Trois mois plus tard, alors qu’elle n’a toujours pas réussi à reprendre le cours de sa vie et qu’elle ne se rappelle de l’évènement que par bribes, Mia décide d’enquêter dans sa mémoire pour retrouver le chemin d’un bonheur possible.

Revoir Paris demeure un joli film sensible, juste et nécessaire, sur l’après-attentat, la douloureuse reconstruction à vivre et la résilience nécessaire pour dépasser le statut de victime.

Peu de films à ce jour ont radiographié ce moment d’horreur où la France a basculé de l’insouciance sans histoires à la crainte des attentats terroristes. Seule la série En Thérapie s’est approchée dans sa première saison de cet instant de bascule en inscrivant ses personnages dans la toile de fond des attentats du 13 novembre 2015. On observe donc Mia (Virginie Efira) vivre ses derniers moments de tranquillité mentale, avant le choc qui, même s’il est largement attendu et prévisible, surprend par sa force de déflagration. Virginie Efira, toute en sensibilité, pudeur et sobriété, incarne avec une grande justesse une femme qui a perdu les souvenirs de ce moment essentiel. Sa « performance » (mot qu’on hésite à employer tant elle évite tous les travers du surjeu) insuffle son âme au film. Elle se reconstruit progressivement au fur et à mesure du film, et réapprend à faire confiance aux gens, ce qui s’avère être le principal défi qu’elle est amenée à rencontrer.

Les écueils du genre sont ainsi mis de côté avec beaucoup de sensibilité : pas de surenchère ni de dramatisation. Néanmoins, le fil tombe malgré tout dans deux travers : une certaine prévisibilité dans l’histoire d’amour, tant il est cousu de fil blanc que deux personnes déjà attirées l’une par l’autre vont finir par tomber amoureuses, une fois atteintes chacune par les attentats, cherchant à guérir ensemble de leurs cicatrices réciproques, ce qui peut se révéler une certaine définition de l’amour. Enfin, le twist de l’histoire à propos d’une victime qui accuse Mia de s’être barricadée dans les toilettes de la brasserie, s’avère assez improbable, défiant toute crédibilité. Néanmoins, Revoir Paris demeure un joli film sensible, juste et nécessaire, sur l’après-attentat, la douloureuse reconstruction à vivre et la résilience nécessaire pour dépasser le statut de victime.

3.5

RÉALISATEUR :  Alice Winocour 
NATIONALITÉ : française
AVEC : Virginie Efira, Grégoire Colin, Benoît Magimel
GENRE : Drame 
DURÉE : 1h45 
DISTRIBUTEUR : Pathé
SORTIE LE 7 septembre 2022