Shelby Oaks : paranoïaque du paranormal

Le film de genre a changé ou plus exactement la perception que nous en avons. Auparavant relégué dans le placard des plaisirs coupables et adolescents, il a depuis gagné ses lettres de noblesse dans les oeuvres respectives de David Cronenberg, John Carpenter, Brian de Palma, etc, Aujourd’hui il n’est plus rare de voir des cinéastes marquants commencer leur oeuvre par des films de genre, comme Ari Aster, Julia Ducournau, Coralie Fargeat. Ancien vidéaste et Youtubeur, Chris Stuckmann emprunte la même voie en adressant une sorte de lettre d’amour au film de genre, en particulier le found footage. Entre The Blair Witch Project et Paranormal Activity, Shelby Oaks, son premier film, rend hommage à toutes ses influences en produisant un film d’horreur efficace à défaut d’être original.

Obsédée par sa disparition, Mia (Camille Sullivan), une jeune femme, recherche désespérément sa sœur Riley, Youtubeuse spécialisée dans le paranormal, mystérieusement évanouie dans la nature il y a 12 ans. Grâce à une cassette vidéo, Mia est persuadée que sa sœur est encore vivante. Sa quête va la mener jusqu’à Shelby Oaks, une ville étrange où règne un mal insaisissable.

Tel quel, le film de Chris Stuckmann apparaît comme un premier essai sous influence, intéressant, prometteur, assez efficace en raison d’une durée ramassée, mais encore un peu limité pour l’instant pour nous donner le grand frisson.

Shelby Oaks est donc un hommage aux films Found footage dont les plus notables sont The Blair Witch project de Daniel Myrick et Eduardo Sanchez, The Visit de M. Night Shyamalan, Cloverfield de Matt Reeves ou encore REC de Jaime Balaguero. En s’inspirant de bandes vidéo trouvées, le genre se caractérise par une immense rentabilité, des effets de cinéma amateur (flou, tremblé, décadrages intempestifs) qui permettent un certain laisser-aller dans la production, en évitant une recherche de la perfection trop ruineuse. Pourtant Shelby Oaks n’est un Found footage que par moitié. En effet, pendant 17 minutes, le film accumulera les effets de Found footage puis le générique commencera, annonçant que le metteur en scène va enfin passer au film proprement dit, produit par un certain Mike Flanagan.

Dès lors les effets de Found footage se réduiront au visionnage d’une cassette vidéo et de certaines bandes sur Internet. Pour autant, cela ne pénalise pas le film car si ces effets sont très bien réalisés avec un réel amour du genre, Shelby Oaks vaut en fait surtout pour sa partie réalisée de manière classique, produisant une atmosphère diffuse et angoissante. Chris Stuckmann a plutôt délaissé les jump scares (on en compte deux ou trois tout au plus, ce qui soulage le spectateur) et s’est concentré sur l’ambiance, avec quelques effets de mise en scène assez réussis (jeu sur la mise au point, éclairage volontairement très sombre pour masquer les visages).

Pour autant, le film divertit sans être fondamentalement marquant. Car il procède d’une multitude de références (un Mal qui passerait de personne en personne, la peur des loups, la conception d’un enfant maudit) et ne parvient guère à s’en dégager suffisamment. En dépit des efforts méritoires de Camille Sullivan, Shelby Oaks ne travaille pas assez sa dimension émouvante (l’obsession d’une femme pour sa soeur disparue) qui, pourtant, aurait pu prédominer et rendre le film possiblement inoubiable. Tel quel, le film de Chris Stuckmann apparaît comme un premier essai sous influence, intéressant, prometteur, assez efficace en raison d’une durée ramassée, mais encore un peu limité pour l’instant pour nous donner le grand frisson.

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RÉALISATEUR : Chris Stuckmann 
NATIONALITÉ : américaine
GENRE : épouvante, horreur, fantastique, thriller
AVEC : Camille Sullivan, Sarah Durn, Brendan Sexton III
DURÉE : 1h31
DISTRIBUTEUR : Metropolitan FilmExport
SORTIE LE 19 novembre 2025